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  • UN CONCOURS AMPHORE EN DEMI-TEINTE

    par Daniel J. Berger | Avr 17, 2019

    La 23ème édition du concours Amphore, pionnier en matière de viticulture bio, plus grande dégustation de vins bio à Paris, a été l’occasion pour son sympathique fondateur Pierre Guigui (ci-contre) d’un point rapide sur l’état du bio en France.

     

    Aujourd’hui, environ 6 000 viticulteurs pratiquent la viticulture biologique ou sont en période de conversion. Soit environ 10% de la surface totale du vignoble. Pierre Guigui a remarqué non sans humour qu’à ce rythme de progression depuis 2007, il faudra 170 ans pour que le vignoble français passe au bio en totalité.

     

    En bref, la filière viticulture bio française en 2016 c’était une production de 1,82 million hl (contre 45 562133 hl au total). Entre 2013 et 2015, le vignoble bio a progressé de 37 %, et le marché français du vin bio qui a augmenté de 33 %, compte pour 15% du marché en valeur. En 2016, la viticulture biologique en France comprenait 5 263 exploitations avec 58 638 ha de vignes. La superficie actuelle est passée à 70 740 ha contre 835 805 ha au total, soit 9% du vignoble.
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    Et en Europe ? En 2015, plus de 280 000 ha de vignes étaient cultivés en bio dans l’UE soit environ 9% du vignoble. L’Espagne, l’Italie et la France se partagent 90% du vignoble bio européen.

    CONCOURS AMPHORE : RÉSULTATS

    Aux concours de dégustation ouverts à tous les pays producteurs et à toutes catégories, les vins bio se distinguent par des notations plus importantes que la proportion de leur participation (11% de bio au Concours Mondial de Bruxelles), notamment en Angleterre où ils atteignent souvent 30% des médaillés. La question ne se pose pas au Concours Amphore où tous les vins sont bio (et biodynamie).

    Le lundi 15 avril dernier, la dégustation à l’aveugle du jury Amphore dont je faisais partie comprenait 18 vins rouges de Bergerac, Fronton et Gaillac. Les bouteilles en lice s’étageaient de 2015 à 2018, incluant un 2008.

    Notre jury a médaillé un tiers des vins (dont trois avaient des défauts et n’ont pas été notés).

    Les six vins rouges médaillés du jury 11, ci-dessus de gauche à droite :

    — Tot Ço Que Gal (Tout ce qu’il faut) – AOC Fronton 2016 – Château Plaisance – NC
    — Tertres du Plantou
    – AOC vin de Bergerac 2016 (médaille d’or) – Château Tertres du Plantou – NC
    — d’Ambre – IGP Comté Tolosan 2018 (médaille d’or) – Les Fées Nature / Maison Labastide – 6,90 €
    — Esquisse – Gaillac 2018 – Domaine Rotier – NC
    — Jardins Saint-Louis – Fronton 2016 – Pas d’information – NC
    — Les Chênes de Saint-Louis – AOC Fronton 2015 – 2ème vin de Château St-Louis – 8,95 €

    Photo de gauche : le grand maître Michel Dovaz (90 ans) auteur de très nombreux ouvrages et dégustateur implacable.
    Photo de droite : l’un des 4 dégustateurs du jury n° 11 et votre serviteur (à droite) prenant connaissance de la liste des vins.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Cette année ont participé 512 vins bio et en conversion de toutes les régions de France, d’Allemagne, d’Autriche, Grèce, Italie, Espagne, Hongrie, dégustés par 150 jurés provenant de France, d’Angleterre, Italie, Luxembourg, Norvège, Suisse, … 150 médailles ont été attribuées récompensant 29% des participants.

    Conclusion en demi-teinte

    Malgré ces bons résultats, une certain scepticisme se fait jour à travers les remarques diffusées aujourd’hui par les organisateurs.

    « Avec une vague verte à tous les étages, il faudrait se réjouir. Des bio en veux-tu en voilà, voici de la Haute Valeur Environnementale avec trois niveaux (HVE pour les intimes), des non bio encore plus bio que les bio, ils sont là, même s’ils refusent tout contrôle…

    A en croire les commentateurs, la vigne et l’agriculture en général n’ont jamais été aussi vertes et responsables. La vigne bio cela a été 11% d’augmentation entre 2016 et 2017. Enfin… 11% de pas grand-chose ça reste pas grand-chose ! A ce rythme, il faudrait attendre 170 ans pour ne plus voir de produits chimiques et de synthèse dans les vignes…

    Et pourtant, malgré ce tsunami écolo et selon les ministères de la transition écologique et de l’agriculture, l’année 2013 a vu une hausse d’utilisation de produits phytosanitaires par rapport à 2012. De plus, « sa valeur moyenne triennale 2014-2016 a même augmenté de plus de 12 % par rapport à la moyenne triennale 2009-2011, » une belle progression qui se consolide dans la même proportion en 2017 avec 12,4 % d’augmentation.»

    La conclusion de Pierre Guigui (ci-contre) néanmoins satisfait de son concours, est sur les progrès du bio manifestement amère :  « toujours plus de bio, de HVE, d’affiliés et autres tours de passe-passe et… toujours plus de produits phytosanitaires ! Cherchez l’erreur, sachant que la vigne n’est que de 3% de la surface utile agricole mais pas loin de 20 % des produits phyto utilisés. »

    Photos Pierrick Bourgault / Concours Amphore
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  • LES CHINOIS À BORDEAUX : 3% DES PROPRIÉTÉS

    par mtvadmin | Avr 8, 2019

    Le blog relaie un article d’Adam Nossiter, responsable du bureau de Paris du New York Times, sur l’une des dernières acquisitions chinoises dans le vignoble bordelais et qui propose sa réflexion sur l’ « identité » des Chinois à Bordeaux.

     

    As Chinese Buy More Vineyards, French Purists Cringe

    Names Like Château Lapin Impérial Rattle Purists Including Philippe Sollers

    From ADAM NOSSITER April 6, 2019

    ARVEYRES, France — The rabbit — the “Imperial Rabbit” — looks out quietly from the vineyard’s sign, sandwiched between the familiar words ‘‘Great Wine of Bordeaux.’’   But there are no rabbits in this vineyard, imperial or otherwise.  Nor are there any “Golden Rabbits” or “Tibetan Antelopes” or even “Grand Antelopes” in the vineyards not far away.

     

    A sign for Château Imperial Rabbit in Arveyres, actually Château Lapin Impérial, formerly Château Larteau. Credit Andrea Mantovani for The New York Times

     

    That has not stopped the new Chinese owner in one of France’s most fabled wine regions from naming his newly acquired chateaus after them — to more than a little consternation among tradition-bound French.  “Up until now, the rabbit has not enjoyed a great reputation in the Bordeaux vineyards,’’ noted Le Résistant, the local newspaper in the regional capital, Libourne.  ‘‘The trend has been, rather, to eradicate it.”

    There is no place more synonymous with France and its tradition of fine wines than Bordeaux.  The style of its long-aging, leathery blends of cabernet sauvignon and merlot, to name just two, have inspired American imitators and are sought after the world over, often at exorbitant prices.

    Yet despite the protestations when it comes to the Chinese, this story of invasion is not a new one for the region on the southwest coast of France.  For centuries, Bordeaux has adapted to foreign money and tastes, with a flexibility that belies the purists’ contention that tradition is inviolable.  Bordeaux accommodated the English when it was under their domination in the 12th and 13th centuries, as well as the Dutch who drained its marshes in the 17th century.  It opened its cellars to the Germans during the Nazi occupation, and more recently it shifted its taste to accommodate the preferences of the California-influenced American wine critic Robert Parker.

    Nan Hu, right, the director general of the Clos des Quatre Vents, the sumptuous property of a Chinese state-owned energy and real estate conglomerate. Credit Andrea Mantovani for The New York Times

     

    Bordeaux goes where the money is.  And the money is now with the Chinese.  “It’s a good thing there are Chinese investors, most definitely.  Because there are too many producers here, and there’s too much wine” said Nan Hu, the director general of the Clos des Quatre Vents, the sumptuous property of a state-owned energy and real estate conglomerate from China. “So, we are important to Bordeaux.”

    Indeed, not all French here are so put out.

    One is Jean Pierre Amoreau, a celebrated maker of Bordeaux at Château Le Puy.  Is he worried? “Not at all,” he said.  The Chinese were helping a lot of owners who, because of high French inheritance taxes, often cannot afford to pass their properties on to children, he argued.  “The Chinese have a lot of liquidity, so they are helping these owners have a decent retirement,” he said.  “And they are helping to preserve the chateaus.”

    Jean-Marie Garde, a producer who heads the winemakers syndicate in the storied Pomerol district nearby, agreed, to a point.  “For the Chinese, we say, ‘Why not?’’’ he said, ‘‘they are present, but not that present.”  Still,  “We’re all a little disconcerted by this name-changing, and what’s a bit disconcerting, too, is that you never meet them,” he said of the new Chinese proprietors.

    Yet they have not been entirely invisible, either.  It was startling, for some, to see the red Chinese flag floating above the Clos des Quatre Vents, within sight of the famous Château Margaux in the Médoc, maker of the highest ranked of all Bordeaux wines.

    Recently, the celebrated writer Philippe Sollers wrote a reproachful open letter to the mayor of Bordeaux, reflecting the anxiety coursing through the region and protesting what some saw as audacity in changing the names of historic chateaus.

    “I’m not excessively curious to know about the life of these animals, never having encountered, during my childhood in Bordeaux, the slightest ‘imperial rabbit’ or ‘Tibetan antelope’, » Mr. Sollers wrote. “Is there no way to rededicate this wine to its legitimate source, affixed by the centuries?”

     

    The Chinese owners “want a return quickly, in two, three years,’’ said Mr. Hu, right, of Clos des Quatre Vents. Credit Andrea Mantovani for The New York Times

     

    Loic Grassin, whose grandfather bought the magnificent white-stone mansion of the Château Senilhac in the Médoc in 1938, was not too keen on the name change either, after he recently sold to a Chinese buyer.  He had never even seen a “Tibetan Antelope,” as the estate was newly named.  “Look, I took it very badly,” he said.  “They debaptized it. It’s bizarre. Animals, I’ve got nothing against them. But, come on, ‘Tibetan Antelope’? Where are they coming from with that one?”

    They are coming from a desire to draw an important link to China, which has become the destination for some 20 % of the wine produced in Bordeaux.  As much as 80 % of the wine produced by the Chinese owners goes straight to China and is never seen in France.

    ‘‘This is not about traditional Chinese culture,’’ said a leading French sinologist, Jean-Philippe Béja of Sciences Po. ‘‘It is about marketing.”  But he disputed that the strategy was in fact a good one.  “This is imitating ‘Made in China,’ which doesn’t even have a good reputation,’’ he said. ‘‘The interest, for the Chinese, is to have something foreign that belongs to them.”

    Perhaps for that reason the Chinese invasion has been limited to perhaps 3 % of the roughly 6,000 chateaus in the Bordelais region.  The Chinese also have not bought any of the most celebrated wine producers, opting instead for the middling and lesser-ranked.

    The Chinese buy middling and lesser-ranked properties such as the one above, instead of the most celebrated. Credit Andrea Mantovani for The New York Times

     

    The Chinese imprint on the style of the wine has been muted, too, in the view of local producers.  “I see no change in style,” said Mr. Amoreau, the winemaker.  “Nobody is going to take the risk of changing this style, for a style that doesn’t really exist,” he said, referring to Chinese wines.  The Chinese owners, in fact, leave much of the actual winemaking in the hands of the French teams already in place.

    As Julia Zhang, who lives on her property near Sainte-Foy, Chinese owners leave much of the winemaking to the French teams in place. Credit Andrea Mantovani for The New York Times

     

    Julia Zhang, a rare Chinese owner who lives on the property, in the Sainte Foy district of Bordeaux, has chosen not to change the name of her Château des Chapelains.  She could not even recall the last name of her chief vintner, Claudine Rey, acknowledging her autonomy. “Claudine runs everything,” she said.

    Ms. Zhang lives alone in her old stone farmhouse, isolated in the vineyards, her real estate-rich husband far away in China.  She speaks almost no French or English and communicates with her staff through an associate. “It takes a lot of courage,” said Laurent Chu, a Franco-Chinese who works for Bordeaux’s chamber of agriculture and serves as liaison for many of the Chinese owners.

    Is Ms. Zhang changing her small corner of France, or is France changing Ms. Zhang?  The evidence suggests the latter.  “I want to be like the French,” she said through Mr. Chu. ‘‘Some of these Chinese investors, they’ve kept their Chinese mentality,” she added.  Others agreed. The Chinese owners “want a return quickly, in two, three years,’’ said Mr. Hu of Clos des Quatre Vents. ‘‘If they don’t see results quickly, they say, ‘Hey, what’s going on?’”

    Chi Keung Tong, a Hong Kong businessman, and his mainland compatriots have bought some 150 properties in the last decade.  Among them is the ‘‘Imperial Rabbit,’’ actually Château Lapin Impérial, formerly the venerable Château Larteau, a property dating back to 1776, on a peaceful stretch of the Dordogne river 30 miles from Bordeaux.

    He did not want to talk about the name change, and neither did the nervous French gatekeeper at the estate, before she shooed away unwelcome visitors.  “No, no, no, it’s not rabbits, it’s hares!” she insisted.  “We’ve got hares, we’ve got deers, we’ve got everything, but we don’t have any rabbits,” she said, before stating the obvious: “things have changed around here. »

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  • DE LA LONDE-LES-MAURES A BANDOL (6/6)

    par Daniel J. Berger | Mar 30, 2019

    Suite et fin de notre escapade en Provence d’octobre 2018, voici la relation d’une dégustation le 16 mars dernier de cinq Bandol rouges 2015 rencontrés lors de notre périple, opérée à l’aveugle par dix amis de Mtonvin qui n’étaient pas du voyage.

    Domaines en lice, dans l’ordre de la dégustation :

    Domaine DUPUY de LÔME – 90% mourvèdre, 10% grenache                                        (17 €)
    Domaine de La TOUR du BON – 55% mourvèdre, 30% grenache, 15% cinsault            (22 €)
    Domaine TEMPIER – 70-75% mourvèdre, grenache et cinsault, 2% vieux carignan       (28 €)
    Château CANADEL – 73% mourvèdre, 20% cinsault, 5% grenache, 2% syrah               (23 €)
    Domaine de TERREBRUNE – 85% mourvèdre, 10% grenache, 5% cinsault                   (28 €)

    Les bouteilles étaient masquées par des « chaussettes » (ou « cachottiers »). Elles avaient été débouchées 2h30 au préalable. La moitié du contenu a été servie en carafe. Le vin de calage était un Terrebrune rosé 2017
    Notation /20 : oeil /3, nez /6, bouche /8, harmonie-équilibre /3.

    RÉSULTATS

    TERREBRUNE     16,2 / 20

    Qualité de l’ensemble, fondu des tannins, intensité,
    sans doute encore un peu trop sur l’alcool.

     

    CANADEL           15,6 / 20 (trois 18/20)

    Intense et capiteux. Belle fusion tannique avec de la douceur. Boisé légèrement présent. Amplitude dans la discrétion.

     

    TOUR du BON     14,4 / 20

    Intensité, acidité un peu agressive, équilibré.
    Encore trop jeune.

     

    TEMPIER              14,4 /20

    Équilibre, léger boisé, fondu tannique.
    Encore jeune.

     

    DUPUY de LÔME   13,9 /20

    Chaleureux, velours, un peu alcooleux.
    Jeune.

     

    CONCLUSION : SIDÉRATION ET ENTHOUSIASME

    Découvrant le Bandol rouge pour la plupart d’entre eux, raison pour laquelle nous souhaitions leur faire partager après notre périple, les dégustateurs ont été très surpris par la puissance alcoolique des 2015 titrant 14° en moyenne, qualifiés par certains d’ « alcooleux. » Les jugeant pas encore tout à fait prêts (« jeunes »), ils ont en majorité apprécié avec enthousiasme leur corpulence (« capiteux »), leur race, leur intensité et leur équilibre (« fondu »).

    Ils ont observé que le classement de la qualité est à peu près parallèle à celui du prix.

    Certains auront pu réfléchir a posteriori aux plats sur lesquels les servir — filet de bœuf au mourvèdre et fondue d’échalottes, jarret de veau aux aubergines, ou encore poulet à l’estragon (recommandés par David Cobbold dans son ouvrage Bandol (Flammarion 2001).

    On constate que l’aération plusieurs heures en carafe s’impose à ces vins dont la garde est de 15-20 ans.

    Ce sont des vins durables dont les prix paraissent assez élevés, mais c’est sans intégrer leur longévité.

    — TERREBRUNE se classe 1er et c’est mérité.
    — CANADEL confirme son ascension au sein des meilleurs Bandol, cercle assez fermé qu’il a intégré d’emblée à la première vinification des jeunes propriétaires en 2014.
    — TEMPIER bien que re-goûté, n’a pas cette fois rallié tous les suffrages.
    — La TOUR du BON se tient avec discrétion dans les tout premiers Bandol.
    — DUPUY de LÔME doit sa note (inférieure à son niveau) à une attaque légèrement agressive due à l’oubli du carafage effectué sur les quatre autres servis en suivant. Avec nos excuses envers ce beau vin qui a été après CANADEL l’autre révélation de notre passage à Bandol.

    Cette dégustation s’est tenue au Hameau de Bellebranche à Saint-Brice (53290) le samedi 16 mars de 19h à 20h, menée par Géraldine des Horts qui l’accueillait chez elle, en respectant la parité féminin-masculin. Y ont participé Mmes Bully Berger, Florence Dexant-Dreux, Bénédicte Mersch, Anne Postec, et MM. Patricio Cadena Pérez, Benoît Combes, Yves des Horts, Vincent Dreux, Cyrille le Tourneur d’Ison. La grille de notation était inspirée des concours professionnels Ligers (vins de Loire), Bettane+Desseauve (Prix plaisir), Amphore (vins bio) et d’autres. On admettra qu’en comparaison aux dégustations professionnelles, ces vins sont sous-notés d’environ un point.
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  • DE LA LONDE-LES-MAURES À BANDOL (5/6)

    par Daniel J. Berger | Mar 28, 2019

    Nous voici arrivés au dernier vignoble de notre voyage-dégustation à Bandol, le Domaine de Terrebrune à Ollioules, créé il y a 55 ans ex nihilo et conduit depuis sans faillir, avec une lucidité et un sens visionnaire exceptionnels.

    Domaine de Terrebrune

    DOMAINE de TERREBRUNE – 15.10.18 15h

    En 1963 Georges Delille sommelier renommé diplômé de l’école hôtelière de Paris, visite la côte provençale et repère une petite bastide perdue au milieu de 7 hectares de vieux oliviers et de vignes abandonnées dont l’unique attrait est son appellation Bandol.

    Il est séduit et l’achète. Car il voit que toutes les composantes d’un grand terroir sont là, un cailloutis de calcaire bleu dans une argile brune qui va donner bientôt son nom au domaine. Cette couche d’argile de 1 à 2 mètres enveloppe directement la roche mère. Et les fissures du calcaire permettent aux racines de la vigne de descendre profondément là où elle va puiser ses éléments nutritifs, tout en régulant son alimentation en eau. Le sommelier décide de créer un vignoble digne de ce nom en transformant les lieux de fond en comble. Il ne va pas se tromper, il sait qu’il pourra produire ici des vins de gastronomie pour les grands (et moins grands) restaurants, des vins aromatiques, généreux, puissants, avec de la minéralité, de la finesse et de la longueur, des beaux vins de garde : à Bandol à cette époque, ce n’est pas encore l’habitude.

    Vont alors se succéder terrassements, restauration des restanques, soin des sols avant plantation des mourvèdre (85%), grenache (30%) et cinsault (15%). En 1975 on creuse la chai en sous-sol pour permettre aux vendanges de se déverser par gravitation sans pompage, et d’y loger progressivement huit cuves de 7 000 litres. Plus de dix ans d’effort vont être nécessaires pour que soit pleinement réalisé le domaine initial de Georges Delille.

    Georges Delille et son fils

    C’est en 1980 que débute la commercialisation des premières bouteilles, année où son fils cadet Reynald (ci-dessus à gauche avec son père Georges) rejoint le domaine après ses études d’œnologie. Il sera suivi quinze ans plus tard par son frère aîné Erick. On emploie les meilleures pratiques — labours à la charrue, piochage et taille à la main, effruitage et ébourgeonnage, traitements respectueux de l’environnement sans produits chimiques, aboutissant en 2008 à la certification AB (Agriculture Biologique) : cela n’a pas été difficile, la discipline du bio était en place depuis le début.

    La superficie du vignoble a été multipliée par quatre, couvrant maintenant 30 ha en AOC Bandol avec un rendement de 35-40 hl/ha (une bouteille par pied de vigne), pour un volume annuel moyen de 120 000 bouteilles. C’est désormais Reynald qui dirige l’exploitation, assisté par l’incontournable œnologue de Bandol, Daniel Abrial, rencontré il y a quelques heures à La Tour du Bon. Au milieu des vignes s’est ouvert un restaurant dont la carte offre des accords mets-vins recherchés. À 90 ans le fondateur continue sa tournée des restaurants clients de Terrebrune qu’il a conquis, il y en a 700 !

    Georges Delille ne s’est pas trompé, ce domaine est aujourd’hui une réussite, celle de toute une vie.

    Ci-dessous le commentaire poétique que l’on peut écouter sur le site www.terrebrune.fr

    Le ciel rythme le travail. Le vigneron défie le temps. Des sillons de labeur se gravent dans le sol. Au gré des rangs de vignes, le vigneron fait ses gammes. Le récital se donnera dans la cave. Une symphonie se joue chaque année. Chef d’orchestre, le vigneron doit conduire à la parfaite harmonie. Son idéal : tendre vers l’absolu plaisir du goût et des saveurs ludiques que peut exalter un vin bien pensé et bien construit. Toute fausse note est fatale et aucune concession n’est possible pour arriver à ses vins. La nature fait le principal, le vigneron fait le reste et s’accorde avec les éléments pour créer une œuvre authentique, dont la noblesse ne peut exister sans le courage et la passion. Le vin s’en nourrit et le vigneron s’en imprègne. Écoute, respect, sincérité le mènent aux confins de son vin. Terrebrune c’est une communion entre un sol, un climat et un cépage, une terre de passion et de patience. Au fil du temps, le vigneron modèle son domaine, au fil des saisons il élabore un millésime, au fil des millésimes il révèle son terroir. Ainsi l’histoire s’écrit, un vin se réalise. Après plus de cinquante ans, le rayonnement de Terrebrune exprime sa vérité, un parfait équilibre d’esprit, de cœur et de corps. (Ci-dessous, le vignoble de Terrebrune devant la mer).

     

    DÉGUSTATION

    les étiquettes du Domaine de Terrebune

    Depuis le millésime 2012 les étiquettes du Domaine de Terrebune mentionnent Terroir du Trias, marnes diversifiées situées sur une rare zone d’affleurement du fond marin remontant à 200 millions d’années. Des sables et des argiles riches en gypse et en sels minéraux s’y sont déposés,confèrant aux vins des trois couleurs des notes minérales inégalables, particularité revendiquée par les Delille comme une caractéristique d’excellence.
    Les bouteilles ci-dessus étaient ouvertes depuis plusieurs jours, sans aucun dommage pour les vins de notre dégustation (même constat qu’à Canadel, voir posts précédents).

    Rosé 2014 AOC Bandol (60% mourvèdre, 10% grenache, 5 % cinsault)
    Ce vin de quatre ans est fruité (agrumes), floral (violette) et minéral (fraîcheur), sans acidité agressive. Il nous réconcilie avec les rosés que nous avons plutôt dédaignés au cours de notre voyage-dégustation, c’est un vrai vin tout simplement. 25 € (prix départ propriété).

    Rosé 2017 AOC Bandol
    Même appréciation que pour le précédent, en plus retenu et moins vineux, avec des arômes d’agrumes et d’abricot sec, et de fines saveurs épicées. 17,50 €

    Blanc 2017 AOC Bandol (50% clairette, 20% ugni blanc, 20% bourboulenc, 5% rolle (vermentino), 5% marsanne)
    Couleur jaune or. Nez de fruits, de fleurs avec un peu de sel. Attaque nette et ronde avec une jolie minéralité. 10-15 ans de garde. 19,50 €

    Rouge 2015 AOC Bandol (85% mourvèdre, 10% grenache, 5% cinsault)
    Vin déjà structuré et charpenté mais trop jeune, dont les arômes pas encore assez évolués de fruits noirs, de réglisse et de cacao laissent présager un belle maturité vers 2020.
    L’assemblage à 85% mourvèdre, cépage noble à petits grains d’origine espagnole à peau très dense qui confère aux vins leur structure tannique et leur grand potentiel de garde, est le fruit de la réflexion des Delille père et fils, qui ont jugé que des qualités du terroir du Trias de Terrebrune résultaient des rouges d’une finesse certes inégalée à Bandol, mais qui devaient ne pas brider leur puissance au profit de la légèreté. 28 €

    Rouge 2013 AOC Bandol (idem)
    Les fruits noirs ont évolué, une dynamique d’heureux contrastes est apparue, la forte concentration tannique s’est apaisée, dégagée de la « bestialité » dont parlait Jim Harrison et que mentionnent volontiers certains chroniqueurs américains à la recherche de naturel ou d’organic qu’évoquent en bouche les notes de chair et de cuir, de truffe, d’épices qui résident dans ce vin mâle. 34 €

    Rouge 2008 AOC Bandol (idem)
    Dix ans ! C’est l’âge requis pour accéder à l’équilibre et la finesse, en un mot la noblesse, et nous y sommes : « le nez révèle des notes d’eucalyptus, de cèdre et de cassis. L’attaque souple et la matière très fine témoignent d’un beau travail sur les tannins. Avec ses notes de cerise et de café, ce bandol a un côté dentelle, plus fin que puissant. » (Guide Gault et Millau). 45 €

    Du 2007, que nous n’avons pas dégusté, Michel Bettane disait déjà : … constante réussite des rouges de Terrebrune qui bénéficient d’une viticulture vraiment idéaliste. Les propriétaires conservent et vendent de vieux millésimes dont le somptueux 2007, expression sublime des épices du mourvèdre arrivé à pleine maturité. NC

    Les participants à ce voyage-dégustation de La Londe-les-Maures à Bandol étaient Odette-Marie Bernier et Etienne Julienne, Geneviève Le Caër, Patrica Zolty, Bully et Daniel Berger, Danièle et Jean-Jacques Lobel, Helen et Charlie Mangani,

    À SUIVRE: RE-DÉGUSTATION DES 5 BANDOL ROUGES 2015 VISITÉS

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  • DE LA LONDE-LES-MAURES À BANDOL (4/6)

    par Daniel J. Berger | Mar 26, 2019

    Poursuivant notre quête des rouges de Bandol, nous sommes passés de chez TEMPIER à LA TOUR DE BON au chemin de l’olivette au Brûlat du Castellet et avons escaladé la colline où perche le domaine.

    LA TOUR DU BON – 15.10.18 11h30

    Tour du bon

    Entre La Cadière d’Azur et le Castellet, au Brulat, la Tour du Bon est située au nord-est de l’appellation Bandol. Le domaine est perché à 150 m d’altitude, bien ventilé et offrant un panorama dégagé sur la Sainte-Baume, la Méditerranée et les villages environnants. Le sol est composé de marnes, calcaire et silice qui facilitent le drainage lors des grosses pluies comme celles que nous venons d’essuyer.

    Agnès HenryC’est Agnès Henry, la propriétaire-vigneronne, qui nous reçoit (en photo à droite). Née à Paris, ingénieure agronome, elle ne connaissait pas le vin et rien ne la prédisposait à en faire. En 1989, après un poste dans l’agroalimentaire, sa mère lui offre de reprendre le domaine Tour du Bon acheté en 1968.

    Conquis par la beauté des lieux, ses parents M. et Mme Hoquard avaient en effet acquis le domaine plus comme une maison de vacances que comme un domaine viticole.

    A partir des années 70, ils ont tout de même replanté le domaine pour arriver à un encépagement respectant le décret des vins de Bandol : mourvèdre (45%), grenache (21%), cinsault (12%), carignan (4%) pour les rouges, et clairette (6%), ugni blanc (2%) et rolle (ou vermentino) 1%.

    En 1990, Agnès Henry a 27 ans. Sans expérience, elle engage une jeune viticulteur, Thierry Puzelat, aujourd’hui propriétaire avec son frère du fameux Clos du Tue Bœuf près de Cheverny (41). Il va s’appliquer à « dompter » le mourvèdre, le roi-cépage. Dompter ? Puzelat est capable de déployer des attributs propres au combat tauromachique, qui le fascine — force, puissance, bravoure, patience. Pendant quatre ans l’aficionado s’ancre dans le terroir avec un engagement peu commun. Lui succède Antoine Pouponneau qui, lui, ira exercer ensuite à Saumur Champigny et en Corse. Depuis, Julien Pierre a pris la suite.

    Daniel Abrial

    Le vignoble est certifié bio depuis 2014. Il ne subit donc aucun traitement chimique, seuls le soufre et cuivre (bouillie bordelaise) sont utilisés. Agnès Henry s’entoure des conseils de Daniel Abrial (à droite), l’œnologue omniprésent à Bandol et autour.

    Elle a un grand respect envers les méthodes de travail héritées des ouvriers piémontais, les premiers dit-on, à avoir cultivé la vigne dans le coin.

     

    La production de rosé domine à environ 60%, le rouge représente 35% et le blanc 5%.

    En rouge, la cuvée normale (15 000 b en moyenne, bien plus jarres de terre en 2018) est à 55 % mourvèdre, 30 % grenache et 15 % cinsault. La cuvée Saint-Ferréol emblématique du domaine, est produite à 3000 b à partir des meilleurs mourvèdres du domaine pour 85% et 15% de carignan. L’élevage des Bandol rouges s’effectue 18 mois en foudres. Les blancs et les rosés sont élevés 6 mois en cuve.
    En 2013 une nouvelle cuvée en IGP * Méditerranée a vu le jour, En-Sol, inspirée par la viticultrice italienne Elisabetta Foradori : le mourvèdre (100%) est vinifié dans 8 jarres de terre cuite (à droite) provenant de chez Juan Padilla, l’artisan spécialiste originaire de la Mancha, espagnol comme le mourvèdre.

    La pratique de la vinification en jarres se répand à Bandol, en Provence et ailleurs.

    * Indication Géographique Protégée, dénomination européenne indiquant qu’au moins l’une des étapes — production, transformation ou élaboration — s’est réalisée dans le lieu affiché. C’est une façon de s’affranchir de la règlementation de l’AOP (ou AOC, et DOC en Italie, DO en Espagne), notamment sur l’assemblage, ici mourvèdre à 100% ce qui excède la proportion maximum de ce cépage autorisée pour l’AOC.

     

    DÉGUSTATION

    Rosé 2017 AOC Bandol
    Agnès Henry annonce d’emblée qu’ « il faut savoir ce qu’on veut faire avant de commencer: ceci est un vrai rosé de Bandol (mouvèdre 40%, 30% cinsault et 30% grenache) avec 13° d’alcool. On s’est efforcé de ne pas privilégier la bouche sur le nez ni le contraire. » L’amertume en fin de bouche est assez élégante. On est plus près d’un vin blanc que d’un vin rouge. 17 €

    Rouge 2015 AOC Bandol
    Assemblage tout en finesse de 55% mourvèdre, 30% grenache, 15% cinsault. À re-déguster plus tard. 22 €

    Rouge 2012 AOC Bandol Cuvée Saint-Férréol Vin Rouge 2012 AOC Bandol Cuvée Saint-Férréol

    Provient d’une sélection des meilleurs mourvèdres sur les parcelles argileuses du domaine.

    Il n’a pas été élevé en jarres de terre cuite, qui en 2012 n’équipaient pas encore le cuvier.

    À huit ans d’âge, le vin est prêt à boire « de préférence avec une daube ou un carré d’agneau, il appelle le sang » souligne Agnès Henry. NC

     

    Cuvée En-Sol 2016 IGP MéditerranéeCuvée En-Sol 2016 IGP Méditerranée
    Mourvèdre 100%. Vieilli naturellement en jarres. 14°.
    Même profil de « vin naturel » fort constitué que le Canaterra de Canadel (voir posts précédents).
    Robe foncée. Arômes de fruits noirs et de fleurs. De la fraîcheur. Bouche souple et complexe avec des contrastes assez mystérieux entre puissance et délicatesse, rarement rencontrés lors de ce voyage-dégustation en Provence.

    Pourra être gardé 10 ans au minimum. 42 €

     

    À SUIVRE : DOMAINE DE TERREBRUNE

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  • DE LA LONDE-LES-MAURES À BANDOL (3/6)

    par Daniel J. Berger | Mar 25, 2019

    Poursuivant notre visite d’octobre à Bandol ayant pour but de mieux connaître les rouges de cette partie emblématique de la Provence, nous sommes montés en direction de la colline du Castellet pour aller visiter l’une des références de Bandol, le DOMAINE TEMPIER.

    DOMAINE TEMPIER – LUNDI 15.10.18 10h

    Lulu TempierEn arrivant chez Tempier, où l’horizon est bouché et le temps gris et humide, nous apercevons une silhouette qui se balance vigoureusement sous un portique.
    Ce ne peut pas être un enfant, elle a les cheveux blancs.

    En avançant vers la balançoire, je distingue une petite vieille dame qui en descend pour reprendre sa canne :  » j’ai perdu ma boucle d’oreille droite, vous pourriez m’aider à la chercher ? » Charlie Mangani qui m’accompagne la retrouve sur le sol mouillé, elle le remercie poliment, elle est pressée et doit nous quitter : c’est Lulu (ci-contre).

    Lulu, Lucie Tempier…
    Elle a rencontré Lucien Peyraud à 16 ans sur la plage de Sanary et l’a épousé à 18 ans en 1935. Il a repris le vignoble des beaux-parents Tempier et été l’initiateur de l’AOC Bandol en 1936. Elle a eu sept enfants en dix ans, a visité tous les vignobles de France et du monde avec Lucien, fait de la voile, publié ses recettes de cuisine aux Etats-Unis (voir notes ci-dessous), été membre du club des Dames du vin et de la table, adoré les fêtes, les contrepèteries et Jim Harrison, l’écrivain américain très apprécié en France et thuriféraire des bandols Tempier.

    Lucien et Lulu Tempier

    Ci-dessus, Lucien et Lulu dans les années 60, trinquant dans des verres à dégustation bien en avance sur leur temps.

    Veuve depuis 1982, Lulu a eu 101 ans en décembre dernier. Elle lit Le Canard Enchaîné, rit, fait de la balançoire tous les matins (après son maquillage), marche (avec sa canne), rit, parcourt les bureaux en donnant quelques ordres, rit, reçoit certains clients, boit un verre de son bandol rouge chaque midi et de Champagne le soir, et rit.

    C’est donc malheureusement sans elle que nous allons déguster : elle « attend des client américains. »

    D’abord le rosé 2017 (50% mourvèdre, 25% cinsault, 25% grenache) : « pressurage et macération à froid pour extraire des arômes de fruits et obtenir une couleur pâle. Nous faisons très peu de saignée. Vinification classique comme le blanc. 8 mois en cuve béton. » À boire maintenant (21 € départ, transport en sus).
    Puis le blanc 2017 : ugni blanc 60%, clairette, bourboulenc, marsanne (2-3%) pour le reste, 8 mois d’élevage en foudre. Le blanc compte pour un petit 3% de leur production. Minéralité, fraîcheur, arômes d’agrumes et de fleurs blanches. À boire et/ou à garder 6 à 8 ans (26 € départ).
    Ensuite le rouge 2016 (70-75 % mourvèdre, le reste en grenache et cinsault et 2% de vieux carignan). C’est un vin déjà constitué et fruité mais, même s’il a passé 18 mois dans des grands foudres de chêne (2 500 à 8 000 l), on sent qu’on aura plus de plaisir à le boire dans 3-4 ans. Commercialisé depuis mai 2018 il pourra durer 15 ans peut-être le double (27 € départ).

    Domaine Templier Bandol 2015Enfin le rouge 2015. Sur mon carnet j’ai noté « prêt », parce qu’une année de plus que le précédent lui confère déjà saveur et rondeur malgré une attaque tannique un peu difficile. Tout ce qu’on nous a dit ici sur le rouge de Bandol est là en bouche — texture serrée du mourvèdre, mâche aux accents méditerranéens, puissance, ampleur.

    Mais la découverte véritable de ce 2015 se fera deux mois plus tard au moment de Noël, chez les amis Ambon, qui n’étaient pas du voyage. C’est incontestablement un « grand vin rouge de garde français », que nous avons surpris faire la dans des sept voiles, livrant petit à petit ses arômes de fruits mûrs, de gibier, qui lui donnent un côté « bestial », de garrigue et d’herbes aromatiques, avec un horizon de minéralité assez torride. Débouché quatre heures avant, Il s’est épanouit tout au long de cette soirée d’hiver (28 € départ).

    On ne peut s’empêcher de relire les extraits de fiches techniques des parcelles phares du Domaine, elles confinent à la poésie : à la Tourtine en haut du Castellet très ensoleillé et bien venté, il arrive que pendant la période estivale on puisse passer une main ou même un poing dans les anfractuosités des lourdes argiles qui se sont rétractées en séchant : cela indique que la vigne a un enracinement profond. Et à côté de ces argiles, on trouve des horizons (strates) colluvionnaires plus limono-sableux, drainants et peu riches, qui apportent beaucoup de finesse aux vins.
    Ou bien : à la Cabassaou adossée à la colline du Castellet, les vignes greffées sur place il y a quelque 60 ans par Lucien Peyraud et son fils François, sont protégées des effets trop violents du mistral : au plus fort de l’été, elles bénéficient de la remontée de vents thermiques qui les ventilent.
    Ou encore : à la Migoua, sur le massif du Beausset Vieux, la fracture géologique du Val d’Arenc fait affleurer des strates successives du Trias, dans un environnement sauvage alternant garrigue et pinèdes où s’imbriquent les vignes.

    Jim HarrisonLa Migoua ou La Tourtine, on ne nous en fait pas goûter ce matin. Voilà ce qu’en dit Jim Harrison (à gauche), dont la mort en 2016 a bien éprouvé son amie Lulu Peyraud née Tempier. Il lui vouait une dévotion intense : « chère Lulu, j’espère te revoir avant d’exploser en une pluie de poussière angélique et je te serre dans mes bras avec amour. » La mort, Jim Harrison l’avait déjà frôlée à bord d’un petit avion à hélices que son pilote avait engagé dans un violent orage au-dessus du lac Michigan. Il avait « embrassé le cul de la mort » et cru sa dernière heure venue. Rentré chez lui exténué, tremblant, furibond, il était « allé chercher deux bouteilles à la cave, une Migoua et une Tourtine. J’ai bu lentement ces deux superbes vins, en méditant sur le caractère criminel de l’aviation civile et sur le fait que les oiseaux, eux, ont la jugeote de ne pas voler dans la tempête. Au bout d’un moment, le Bandol béni m’a remis l’esprit en place et je me suis dit qu’au fond nous ne sommes que des fleurs dans le vide. » (1)

    Après avoir dépensé les cachets perçus de Hollywood entre 1989 et 1996 pour les adaptations de six de ses romans (2) dans l’achat de grands crus (Romanée Conti, Château Margaux, Petrus, etc., etc.) de la cave d’un riche homme d’affaires, éclusés rapidement et en totalité, il était devenu un « born again » du bandol Tempier. Une douzaine de fois entre 1994 et 2010, il avait fait le voyage jusqu’ici pour venir s’asseoir à la table de Lulu et boire ses vins préférés avec elle : il déclarait en avoir acheté plus de 50 caisses (3). Préférés, selon l’écrivant et journaliste américain Bradbury Kuett, parce que leur tension (tautness) et leurs arômes rustiques le mettaient en harmonie avec un monde à l’état sauvage et que, bus la nuit, ils chassaient les monstres qui hantaient ses rêves.

    En 2016, Tempier a racheté les 20 hectares du domaine de La Laidière (sans doute le meilleur bandol blanc) dont le nom disparaît, ses vignes aussitôt converties à la culture bio maison et désormais vinifiées avec celles du domaine Tempier, devenu une grande exploitation de 60 ha. Sous l’égide de la famille, qui s’est bien agrandie, elle est dirigée par Daniel Ravier, rugbyman, arrivé en 2000 après un passage chez Ott et dix ans au Domaine de Souviou. Il a été convaincu de faire le pas par les deux fils Reynaud et appuyé par Daniel Abrial, l’œnologue incontournable de Bandol — que nous allons retrouver à La Tour du Bon.

    À SUIVRE… LA TOUR DU BON et TERREBRUNE

    Jim Harrison The Raw and the CookedLivre Lulu's Provençal Table

    (1) D’après une citation dans le Dictionnaire amoureux du vin de Bernard Pivot (Plon 2006) d’un passage d’Aventures d’un gourmand vagabond 10/18 (The Raw and the Cooked, 2001, à gauche).
    (2) Cold Feet / L’amour à petits pas (Robert Dornheim, 1989);
    Revenge / Vengeance (Tony Scott, 1990);
    Legends Of The Fall / Légendes d’automne (Edward Zwick, 1994);
    Wolf (Mike Nichols, 1994);
    Dalva (Ken Cameron, TV, 1996);
    Carried Away (adaptation de Farmer / Nord Michigan, Bruno Barreto, 1996).
    (3) de 12 soit 600 bouteilles, c-à-d une palette.
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