• Facebook
  • Twitter
Mtonvin.net
  • Accueil
  • Nos parrains
  • Mission – Vocation
  • Liens blogs Vin
  • Archives
  • Contact
Sélectionner une page
  • LA 7ÈME ‘CUVÉE MTONVIN’ (SUITE)

    par Daniel J. Berger | Juin 9, 2020

    La cuvée spéciale ‘Mtonvin’ n°7 a été lancée le lendemain du déconfinement 1ère phase. C’est la première fois qu’une cuvée spéciale ‘Mtonvin’ comprend deux vins, millésime 2016 : le médoc Château Tour Haut-Caussan, et le corbières Château Cascadais, dont le 2011 avait déjà fait l’objet d’une cuvée spéciale et été très apprécié.

    La période de pandémie est très difficile pour les viticulteurs privés à la fois de distribution dans l’Hexagone et d’export à l’international. Cette cuvée spéciale n°7 est notre manière de soutenir la famille Courrian, dont les vins remarquables à prix raisonnable correspondent bien à l’esprit ‘Mtonvin’. 

    Le propriétaire des deux domaines, Philippe Courrian, commente sa carrière de plus de soixante ans. Suite du premier chapitre…

    NOTRE RÉCIT DES VINS DE PHILIPPE COURRIAN (2)

    Philippe Courrian (ci-contre) a quitté le séminaire à l’âge de 13 ans pour venir travailler au domaine de ses parents dans le Médoc à Blaignan, au château Tour Haut-Caussan. Au début il peine à en vivre et doit aller travailler ailleurs comme régisseur. Il en revient assez vite « car, croyez-moi, mieux vaut être pauvre chez soi que chez les autres ! » Il travaille la vigne d’abord avec un cheval, et en 1965 « il y a eu engouement pour le tracteur, le rendement, la rentabilité, l’industrialisation… Souvent au détriment de la qualité, ce qui n’a pas forcément enrichi les vignerons. »

    Mais la roue de la fortune ne va pas l’oublier: moins de 10 ans après ses débuts, en 1973, il vend au plus cher toute sa récolte au négociant américain Alexis Lichine installé à Bordeaux. Il est sorti de l’ornière, on le remarque, on écoute désormais M. Philippe Courrian.

    En 1992, il achète dans les Corbières les dépendances du château Saint-Laurent à M. de Bermon de Vaux, un vieux moulin enfoui sous les ronces et huit hectares de vignes quasi abandonnées.

    Le domaine couvre aujourd’hui vingt cinq hectares de vignes et d’oliviers.

    La propriété nichée dans la vallée de la Nielle, entourée de collines de garrigues et de pinèdes, est traversée par une petite rivière et de multiples cascades : il la rebaptise Château Cascadais.

    Laissons donc Philippe Courrian préciser quelles étaient ses intentions d’alors (d’après son livre Vigneron du Médoc (*).

    Du Médoc aux Corbières

    « Après 50 ans passés dans le Médoc, j’ai eu envie de vivre autre chose, de repartir vers une nouvelle « quête métaphysique ». Et en 1992 les Corbières se sont trouvées sur mon chemin : je suis tombé amoureux d’une petite vallée avec quelques vignes autour. Au pied de maisons plusieurs fois centenaires coule une rivière qui dégringole de la montagne au rythme de cascades où l’on se baigne en été. Ces collines des Corbières rassemblent et résument toute ma vie avec l’idée rassurante de cette quiétude que je retrouve chaque fois que je pénètre dans ma vallée. Ce poste frontière, ces châteaux accrochés aux nuages, l’idée de ce Sud et cette présence cathare, l’austérité de cette nature restée pratiquement vierge, et bien sûr la vigne, tout me poussait vers ce pays. Je suis vigne et ne pouvais l’être que là. »

    Il ajoutait : « Je vais redevenir paysan au sens le plus noble, je vais modeler le paysage et retrouver l’accord entre l’homme et la nature. Comme je mets mes raisins à ras du sol, au point de rencontre du pouvoir tellurique et du pouvoir cosmique, ce point de jonction me fascine. Mes dernières années d’exercice, je les vois ici dans ces Corbières, à rechercher les racines de la création du vin, avec une certaine virginité qui a disparu dans le Médoc. »

    « La métairie ombragée aux volets bleus »

    C’est en septembre 2005 que je me suis rendu à Cascadais — oublions vite le « château », la métairie ombragée aux volets bleus que Philippe Courrian a restaurée ne prétend qu’à la simplicité, l’intimité même. Il m’y a accueilli par ces mots : je ne sais pas pourquoi vous êtes ici, mais vous êtes le bienvenu. Il m’a tendu un panier en osier avec du pain, de la terrine et du saucisson, des fruits et une bouteille, puis m’a dit en souriant: allez vous promener dans les vignes, profitez de la nature, voyez comme elle est belle, moi j’ai à faire, nous nous verrons ce soir.

    J’ai découvert sous le soleil généreux de septembre d’après les vendanges un vignoble en forme de cirque, où s’écoulent en silence de multiples petites cascades formant autant de lagons vert jade.

    Au détour d’une haie j’en ai trouvé un à l’ombre (ci-dessous) et je me suis posé, « Vigneron du Médoc » en main que j’ai relu d’une traite, en allant de temps en temps piquer une tête dans l’eau claire.

    Lagon, ta pureté n’inspire-t-elle pas celui qui la recherche quand il crée son vin ?

    Le terroir de Cascadais. Entre fin du Massif Central et début des Pyrénées, les Corbières sont parsemées de collines (400 à 500 m), aux couleurs changeantes et aux reliefs variés, rappelant par endroits celles de Toscane. Sur les sols de calcaire et de schistes la végétation est rare voire absente, à l’exception de la vigne cultivée dans les parties les moins arides.

    Cascadais : au milieu de la vallée coule une rivière

    Les vignes de Cascadais comprennent les cinq cépages traditionnels de la région — vieux carignan, grenache noir, syrah et dans une moindre mesure, mouvèdre et cinsault. Elle donnent des vins d’un rouge grenat foncé, dégageant au nez des arômes de fruits noirs et rouges (cerises) mûrs, avec des notes poivrées et de réglisse, accompagnés d’odeurs de garrigue, de violette, de thym et romarin. En bouche, ils sont opulents, harmonieux, fruités et solidement charpentés, la matière est extraite avec art, on sent la chair et le gras, avec en finale de la fraîcheur sur une trame minérale. On ressent l’authenticité du terroir avec une impression d’exotisme sur la longueur.

    Écrire la suite de « Vigneron du Médoc ? » J’étais venu lui proposer d’écrire une suite à ce livre que je trouvais passionnant par sa franchise, et son exigence et sa modestie à la fois. À la fin de l’après-midi j’ai retrouvé Courrianà son logis et nous avons discuté dans sa grande cuisine rustique en dînant et en buvant, interrompus la nuit tombée par le passage de collègues vignerons dont la langue résonnait fort.

    Chez Philippe Courrian, déguster est un exercice sans faste ni manières, alternant ce soir-là Corbières, le sien et ceux d’amis, et Médoc notamment le fameux Tour Haut-Caussan 1990 en magnum, en dissertant sur leur personnalité et traits respectifs. Il parlait du tannat 100% qu’il commençait à élever en barriques, venues de Tour Haut-Caussan. Surpris par la facilité avec laquelle les vins se laissaient boire, j’écoutais, prenais des notes, questionnais, discutais et à un moment j’ai perdu pied… pour me retrouver le matin suivant tout habillé sur le lit d’une chambre au premier étage.

    Il m’a emmené déjeuner à l’Abbaye de Lagrasse (ou était-ce Fontfroide ?) et là m’a confié qu’il ne pouvait pas laisser à un autre que Michel Creignou le soin d’écrire une suite genre « Vigneron des Corbières ». Pas sûr d’ailleurs qu’il en ait eu très envie, je n’ai pas cru bon d’insister, respectant sa fidélité envers le journaliste qui l’avait fait connaître au grand public. Le livre possible ne s’est jamais fait, dommage, j’aurais bien aimé qu’avec sa sensualité, son acuité et sa sagesse, il comment comment il allait élaborer « un vin [qui] ressemble à l’écriture d’un poème », ainsi qu’il le dit à la fin du livre, conclu en ces termes :  » le vin a sa force interne, sa propre inertie qui conduit à la création. […] La création de l’art n’est pas intellectuelle mais la consommation de l’art passe impérativement pas l’esprit. »

    Voilà quelques raisons qui nous font aimer les vins de Philippe Courrian et admirer hier comme aujourd’hui l’homme qui les produit, surpris de tout, étonné de rien, et la manière dont il mène sa vie, les étapes de sa pensée, de son imagination, de la maîtrise de son art auquel il tient.

    (*) Vigneron du Médoc

    Philippe Courrian, Michel Creignou, Éditions Payot, 1996, encore disponible neuf ou d’occasion sur les sites spécialisés — Rakuten, AbeBooks, Momox, Amazon, etc.

    _____________________________________________________________________

    ALAIN DUTOURNIER, chef étoilé du Carré des Feuillants et du Trou Gascon à Paris, son ami (interview La RVF 2018)

    « Philippe Courrian, c’est la mémoire du Médoc. Il n’a pas eu la chance de vinifier un grand terroir, sa propriété familiale étant tout au nord du Médoc. Mais justement, il a fait de Tour Haut-Caussan un vin sublime. Imaginez ce que cet homme talentueux aurait fait d’un terroir plus noble. Philippe, c’est la passion, avec une extraordinaire connaissance de la viticulture du Médoc. Il est allé ensemencer ses connaissances à Cascadais, dans les Corbières. Avec sagesse, il réveille ce vignoble. »

    ______________________________________________________________________

    JACQUES DUPONT, Rédacteur en Chef Vin (article Le Point 2019)

    « Blaignan, un point sur la carte dans ce coin perché du Médoc, non loin de l’estuaire, où rien ne semble bouger. Paysage identique de vignes et de petites routes où l’on peut se perdre, la présence du fleuve que l’on n’aperçoit pas, mais dont on devine en permanence la force. Rien n’a changé, sauf les propriétaires. Véronique et Fabien Courrian, quatrième génération sur le domaine, une famille médocaine pur jus depuis le XVIIe siècle (au moins), peuvent en témoigner : « On était dix-huit producteurs, on n’est plus que trois. Aujourd’hui, 60 % du vignoble appartiennent aux Chinois, 20 % au Crédit Agricole et le reste, c’est nous. Les problèmes de succession, les gens qui ont vendu leurs vins via la grande distribution et qui, pressurés, se sont retrouvés sans trésorerie... »

    « Avec leur fichier de 6 000 clients, les Courrian qui ont toujours misé sur les particuliers, les cavistes et la restauration, maintiennent leur activité même si les temps sont difficiles. Les prix raisonnables pratiqués par le domaine n’y sont pas pour rien, mais c’est surtout la qualité des vins qui fidélise la clientèle. […] Tour Haut-Caussan a trouvé depuis longtemps son équilibre, une position délicate et qui demande de l’humilité de la part du vinificateur : un vin de garde, notre dégustation le prouve, mais qui peut se boire jeune. Philippe Courrian, le papa du duo, avait installé la légende, créé la notoriété. Fabien qui gère la vigne et le chai de Tour Haut Caussan, et Véronique qui s’occupe de vendre les vins y compris Cascadais en ont affiné les pratiques.« 

    « Philippe, lui, a pris le large ou plutôt le sud en rachetant en 1992, une petite vallée dans les Corbières qui a coûté le prix de trois hectares de médoc. Un paradis entouré de cascades – le vin délicieux qu’on y produit s’appelle Cascadais – d’où il sort rarement sauf pour venir voir ses enfants et casser la croûte avec son ami Michel Tesseron à Château Lafon-Rochet  » (Grand Cru Classé Saint-Estèphe)

    Dégustation Château Tour Haut-Caussan 2016 : 15,5/20 – Fruits noirs, fermé, bouche ronde, fondue, joli fruit, bonne matière, tanins vifs, un vin nerveux, fruité, tendu. Joli vin frais et de garde. 12,80 €.

    Dégustation Château Cascadais (Bio) 2016 : 15/20 – Nez épicé, notes de garrigues, bouche serrée, tendue, fruits noirs. 7,80 €.

    ATTENTION, les prix consentis pour les deux vins de la cuvée spéciale ‘Mtonvin’ n°7 ne sont pas ceux publiés ci-dessus: pour en savoir plus, contactez-nous via <contact@mtonvin.net>

    _____________________________________________________________________

    Photos Vincent Pousson

    Tweet
  • DÉCONFINEMENT: 7ème ‘CUVÉE MTONVIN’

    par Daniel J. Berger | Juin 5, 2020

    La cuvée spéciale ‘Mtonvin’ n°7 est lancée. Disponible jusqu’au 1er juillet, l’offre est double : un fleuron du Médoc, Tour Haut-Caussan, et un Corbières au top, Cascadais, tous deux produits par la famille Courrian, proposés à un prix défiant toute concurrence. Déconfinez-vous !

    « En figurant sur l’étiquette, le moulin
    est devenu l’emblème de
    Tour Haut-Caussan. »

    Deux ans après la précédente cuvée spéciale (Marquis de Saint-Estèphe), le moment est arrivé de lancer la 7ème !

    Après plusieurs recherches, excursions et dégustations notamment en Languedoc et en bordelais, le choix du groupe de dégustateurs ‘Mtonvin’ s’est arrêté cette année sur le château Tour Haut-Caussan 2016, exemple de la meilleure tradition médocaine, reconnu et apprécié des connaisseurs dans le monde.

    Pour la première fois, la cuvée spéciale Mtonvin comprend 2 vins

    Le 2ème vous le connaissez, également un 2016, c’est le château Cascadais (dont le 2011 — la cuvée spéciale n°4 — apprécié pour son corps, son fruit et ses arômes légèrement exotiques), produit dans les Corbières par Philippe Courrian, qui avait relevé le vignoble de Tour Haut-Caussan et restauré le moulin à vent, transmis depuis à ses enfants Véronique et Fabien. 

    De g à d, Fabien, Philippe et Véronique Courrian

    Vous avez la possibilité de choisir un seul vin ou de panacher l’un et l’autre, ils sont tous deux accomplis et prêts à boire sans avoir à patienter.

    En la période actuelle de pandémie, très difficile pour les viticulteurs privés à la fois de distribution dans l’Hexagone et d’export à l’international, c’est notre manière de soutenir la famille Courrian, dont les vins remarquables à prix raisonnable correspondent bien à l’esprit ‘Mtonvin’. 

    LA CUVÉE SPÉCIALE ‘MTONVIN’ N°7 

    — CHÂTEAU TOUR HAUT-CAUSSAN 2016: AOC Médoc. Cépages: 50% cabernet sauvignon; 50% merlot. Âge moyen des vignes: 30 ans. Superficie du vignoble: 17 ha répartis sur Blaignan (sol argilo-calcaire) et Potensac (graves), en Gironde. Production: 95 000 b. 

    — CHÂTEAU CASCADAIS 2016: AOC Corbières. Cépages: 32% vieux carignan; 32% syrah: 28% grenache noir; 4% mourvèdre; 4% cinsault. Âge moyen des vignes: 50 ans. Superficie: 25 ha à St-Laurent de la Cabrerisse (limon et sable), dans l’Aude. Production: 72 000 b.

    — RÉSERVATIONS: jusqu’au 1er juillet 2020.

    — PRIX: les prix consentis s’entendent sine qua non pour l’achat d’un volume cumulé de 10 000 bouteilles (cuvée n°6 précédente: 11 196 b). NOUS CONSULTER: contact@mtonvin.net. Faites connaître l’offre autour de vous pour atteindre le volume requis. 

    — LIVRAISON: semaine 42 (14, 15 et 16 octobre) aux points suivants : Paris, proche banlieue sud; sud Mayenne; Dax; Orléans; Haute-Savoie; Stuttgart.

    — CONDITIONNEMENT: en cartons de 6, plus faciles à manipuler et à différencier : Tour Haut-Caussan cartons blancs, Cascadais cartons bruns. Quantités faciles à moduler par multiples de 6. Étiquettes signées Cuvée Spéciale Mtonvin n°7.

    NOTRE RÉCIT DES VINS DE PHILIPPE COURRIAN (1)

    Mon premier contact avec Tour Haut-Caussan remonte à décembre 1993. Je dînais à La Tupina à Bordeaux avec Alfred Tesseron qui, après vingt ans d’un effort obstiné, avait propulsé son pauillac Pontet-Canet aux tout premiers rangs des grands crus de Bordeaux (et qui finira par obtenir en 2009 la notation suprême de Robert Parker, 100 sur 100). Au moment de choisir le vin, Alfred en commande un dont je n’avais pas compris le nom immédiatement. Nous parlions de choses et d’autres, du passé — de New York où nous nous étions connus en 1974, alors qu’il était employé chez l’importateur Shaw-Ross, et que je réalisais pour la télévision française un programme sur la soul music. Il nous invitait mon épouse et moi dans la propriété qu’il avait louée à Long Island et nous buvions du Barton & Guestier dont il promenait des cartons dans le coffre de son Impala décapotable.

    Au milieu du dîner Alfred (à gauche) me montre la bouteille, dont l’étiquette avec son moulin à vent est reconnaissable, et me dit d’une mine à la fois consternée et admirative: «  je ne comprends pas comment il y arrive, je ne sais pas ce qu’il fait… »

    Venant d’Alfred Tesseron, cela valait réel compliment. 

    Je ne m’intéressai pas tout de suite à ce vin de Blaignan, personnification du Médoc, remonté dans les classements des crus bourgeois dans les années 80. J’avais appris depuis que Château Tour Haut-Caussan avait vraiment décollé avec sa récolte 1973 vendue la plus chère du Médoc au négociant Alexis Lichine. J’étais plus concentré sur un autre miraculé, Château Cantemerle, haut-médoc relevé à partir de 1981 par une compagnie d’assurances qui m’avait confié une mission interne de communication. Puis au hasard d’achats dans un entrepôt à la porte d’Aubervilliers (Léonelli †), j’avais découvert le corbières Château Cascadais, sans réaliser qu’il était produit par le même vigneron que Tour Haut-Caussan.

    Ces deux délectables crus ont été parmi les premiers à faire partie de nos cuvées spéciales des années 90, dont la diffusion était plus réduite qu’aujourd’hui. Tour Haut-Caussan et Cascadais étaient devenus des copains, nous les rencontrions régulièrement chez l’un ou chez l’autre de nos amis buveurs. Puis était paru Vigneron du Médoc en 1996, témoignage habilement mis en forme par le journaliste Michel Creignou (*), l’un des livres de vin les plus sympathiques, instructif, narratif, intelligent, humain et… nostalgique.

    En voici quelques passages, édités pour le blog.

    « Tour Haut-Caussan trouve l’origine de son nom dans le moulin qui occupait la sommet de la colline de Caussan. Quand mes parents ont acheté une partie du château Caussan, ils devaient rajouter un nom pour se différencier. Tout naturellement, en regardant les ruines du moulin ils ont ajouté « La Tour » […] Près d’un siècle après, Château Latour, 1er Cru Classé de Pauillac, m’a fait un procès pour m’obliger à enlever l’article (à g. le 1975 avec l’étiquette avant suppression du « LA », à 68 € chez Cdiscount… NdE). C’était un peu fort de café mais que peut faire le pot de terre contre le pot de fer ? […] Ajoutons que dès qu’une propriété se créait en Médoc, le « châtelain » ne pouvait s’empêcher de construire une tour, accolée au château ou au milieu des vignes : il y avait 80 châteaux La Tour « quelque chose » en bordelais.

    La tour et le moulin

    Ailes du moulin: rouet, bardeaux, alluchons, tout à l’ancienne. Photo Vincent Pousson

    « L’année 1981 restera « l’année du moulin ». J’ai embauché un compagnon charpentier, Patrick Eymeric, et pendant un an nous nous sommes lancés dans une restauration vite devenue une formidable aventure. Un tailleur de pierre est venu refaire les marches d’escalier et j’ai acheté un vieux moulin à Queyrac pour en récupérer la meule et le mécanisme. L’architecture, les matériaux, tout a été refait à l’ancienne. La voilure assemble 6 600 bardeaux de châtaignier provenant de chez Richard à Guéret, dernier fabricant à l’ancienne de tuiles de bois, le rouet a pu être fait en ormeau et ses 40 alluchons en cormier. L’épisode du moulin a changé ma façon de le regarder, je me suis senti initié, la vision des Compagnons du tour de France a marqué de manière indélébile mon travail de longues années dans les vignes. »

    Médoc et Haut-Médoc

     » Le même nom Médoc s’applique à l’ensemble de la région qui couvre la rive gauche de la Gironde, de Bordeaux au Verdon, et deux AOC, le Haut-Médoc, et le Médoc, qui s’étend au delà de Saint-Estèphe. En fait, le pays fonctionne sur deux échelles, à la vitesse respective de chacune des appellations. Ce ne sont pas simplement des nuances de style mais une cohabitation de deux mondes mitoyens qui vivent à des années-lumière l’un de l’autre.

    Dans le sud au delà de Saint-Yzans, à quelques kilomètres de Blaignan où est situé Tour Haut-Caussan, commence un univers qui n’a pas grand chose à voir avec le tradition médocaine : le Haut-Médoc des grands châteaux, des crus classés, des aristocrates du vin, aussi loin que Bruxelles ou Berlin, c’est un autre mode de vie séparé par une frontière.

    Longtemps, l’endroit où je vivais s’est appelé Bas-Médoc, le bas pays, loin de la ville et du reste du monde, pour ne pas dire le pays des ploucs. Mentalité, approche, tout est différent, les propriétés du Médoc sont demeurées familiales, nous sommes des paysans. Alors qu’en Haut-Médoc, les châteaux appartiennent souvent à des banques ou des assurances, les domaines changent de main, les ventes sont difficiles à suivre et il est souvent délicat de savoir qui est le propriétaire. Et les vignerons du Médoc ne soupçonnent pas la qualité des vins produits dans le sud au-delà de Saint-Estèphe, incrédules, ils doivent penser qu’il y a un truc et ne sont guère admiratifs. […]

    Drôle de pays le Médoc. Sur une centaine de kilomètres, la vigne apparaît comme une culture intensive. Mais ce n’est pas un pays naturel, c’est une œuvre intellectuelle, une nature domptée et façonnée par les hommes, depuis l’assèchement des marais qui le recouvraient au XVIIème. Des travaux gigantesques ont permis la construction de la digue des Hollandais, appelée ainsi en hommage aux ingénieurs qui l’ont construite et qui a mis deux siècles pour arriver jusqu’au Verdon. Au moyen d’écluses se fermant à marée montante et se rouvrant quand la mer descend, elle a protégé les terres d’abord plantées de céréales. Les Médocains ont construit 150 moulins à vent (dont le nôtre et six autres sur Blaignan) et certains ont continué à tourner jusqu’en 1939. Chaque propriété moulait ses grains, vivait en autarcie avec une mentalité insulaire, autour d’une basse-cour et d’une soue à cochons. »

    Années 80, décennie prodigieuse

    « Les années 80 ont couvert d’or le vignoble girondin. Pourtant cette période faste n’a pas eu le même goût pour toute le monde, l’appellation Médoc a fonctionné à deux vitesses. Si les propriétaires qui mettaient en bouteille ont décollé, ceux qui vendaient encore en vrac sont restés sur le quai. […] Entre 1982, point culminant d’une époque révolue, et 1990, le vignoble médocain a basculé vers la modernité. De nouveaux produits de traitement sont apparus, les œnologues-conseils sont devenus des stars, des choix se sont imposés et plus rien ne pouvait être comme avant. Les vins de Bordeaux ont pris une nouvelle direction, sont devenus luxuriants oubliant leur nature cosmique pour devenir plus industriels. En 1990, les vignerons ont cru qu’il ne serait pas possible de faire mieux qu’eux, que jamais plus Bordeaux ne connaîtrait la crise. Pendant les périodes fastes, comme après la Révolution ou pendant les années 1862-1879, ils ont toujours la même façon de penser, mais l’Histoire leur donne tort : les Bordelais sont les champions du péché d’orgueil. »

    Le bonheur des vendanges

     » La vendange c’est le grand moment de l’année, où le vigneron attend la récompense de son travail. L’anxiété monte insensiblement. […] À chaque fois je fais le même rêve, manquer de place dans mon chai pour rentrer tous les raisins. Je retrouve le nœud à l’estomac que j’avais en franchissant la porte de la pension de mon enfance. Et avec l’âge, la tension a tendance à monter, plus je mets la barre haut, plus l’anxiété gonfle. […] Chaque matin en me réveillant je mets le nez à la fenêtre pour me rendre comment marche le ciel. Les vendanges je finirai bien par les faire, techniquement tout est au point, je ne manquerai pas de vendangeurs, le cuvier est prêt, les pompes ont été vérifiées, mais j’ai l’angoisse de cette pluie qui peut mettre tout par terre. Et aussi de ne pas réussir le vin que je souhaite. Cette anxiété commence début septembre et ne s’arrête que lorsque le vin est logé dans les barriques.

    Vendanges devant le moulin de Tour Haut-Caussan

    Le premier jour des vendanges est toujours une libération. Alors tout se passe dans une ambiance exceptionnelle, les doigts collent, la chaleur est là, ça sent bon dans le chai… Chaque vendange a son parfum. En 1982 par exemple, quand le raisin a commencé à fermenter, on se regardait sans comprendre, les chais dégageaient des arômes de fruits rouges et noirs que personne n’avait jamais sentis.

    […] Les soirs de vendanges à Tour Haut-Caussan, c’est toujours la fête, les vendangeurs dansent dans la salle à manger. Et la soupe doit être bonne pour maintenir le moral de la troupe ! Car le travail est dur, surtout quand il pleut, les vendangeurs donnent beaucoup, et le chef de bande ou plutôt l’entraîneur que je suis leur donne aussi, je leur trace un cadre, je crée une ambiance.

    Dans le temps, quand les raisins étaient rentrés, les propriétaires remerciaient femmes et hommes qui avaient durement travaillé. Dans le nord Médoc la fête s’appelait l' »aoucat », l’oie grasse cuite en daube accompagnée de haricots.; ailleurs c’était la « gerbaude. » La cuisinière recevait un bouquet de fleurs des champs qui était placé au-dessus de la porte du cuvier jusqu’à Noël en forme de promesse, celle du vin nouveau. Le dernier jour des vendanges c’est la fin d’un cycle, un mélange de joie et de tristesse, certains vendangeurs repartent en pleurant. »

    La vigne, reflet de notre civilisation

    Tour Haut-Caussan, sémaphore du Médoc.

     » Il est faux de dire que la vigne doit souffrir, elle doit concentrer. Les grappes, ses petits, doivent avoir été conçues dans le bonheur. Après le 15 juillet commence la période éducative qui va se poursuivre jusqu’au vieillissement. Sous l’action de la chaleur, l’eau des raisins sera éliminée au fur et à mesure de l’été. Les bons millésimes sont ceux où la vigne a su concentrer les raisins au maximum, mais en même temps, si elle a souffert de manque d’eau elle ne donne jamais un grand vin.

    La vigne m’apparaît comme le reflet de notre civilisation. L’intuition demeure la meilleure des conseillères et personne ne détient les clefs de la réussite. Je regarde ma vigne plus comme un philosophe que comme un paysan, c’est ma façon d’avancer, je réfléchis plus que je ne cultive. La vigne est devenue un mécanisme de pensée, une espèce de religion mais… je ne dirai jamais que ce que je fais est mieux. »

    (*) Vigneron du Médoc

    Philippe Courrian, Michel Creignou, Éditions Payot, 1996, encore disponible neuf ou d’occasion sur les sites spécialisés — Rakuten, AbeBooks, Momox, Amazon, etc.

    ________________________________________________________________

    CASCADAIS À SUIVRE…

    Tweet
  • FAIRE FACE

    par mtvadmin | Mar 24, 2020

    Tweet
  • AVIS DE RECHERCHE

    par mtvadmin | Mar 21, 2020

    Nous recherchons le livre de Jean-Paul Kauffmann BORDEAUX RETROUVÉ paru hors commerce en 1989.

    Faire offres sur ce blog.


    Tweet
  • CHAU–VINS

    par Daniel J. Berger | Fév 19, 2020

    WINE SEARCHER | Don Kavanagh | Tuesday, 18-Feb-2020

    L’une des raisons de l’existence du blog mtonvin.net est la volonté d’ouverture du goût du vin au-delà de la France, région vinicole prédominante sur le globe souvent exclusive des autres. Elle est loin d’être la seule. Le journaliste irlandais Don Kavanagh (ci-contre) évalue statistiques à l’appui l’état du nationalisme gustatif dans les principaux pays de vin.

    Measuring Wine’s Natural Chauvinism How Everyone has their own ideas about which wines they prefer, but exactly how adventurous are we, really?

    Albert Einstein once said that « Nationalism is an infantile thing; it is the measles of mankind » (which is a lot pithier than even the simplified version of his General Theory of Relativity) but, when it comes to wine, some of us have a more obvious rash than others.

    It’s natural to imagine that people might prefer their own local produce to similar goods shipped in from distant lands at great expense, although that would also suggest that some people would be happy to settle for gruel when they could be dining on foie gras. And that is the situation when it comes to wine.

    © iStock | The French are parochial about wine? Quelle surprise!

    When it comes to wine, the accepted wisdom is that – unless you are French — your local wine is inherently inferior to the imported stuff.

    And if you are French, you have no interest in any wine that comes from beyond your borders. That’s not necessarily the case, however.

    We took a look at wine searches from countries that produce wine and, to be perfectly honest, we assumed the situation would be akin to George Bernard Shaw’s definition of patriotism: the conviction that a particular country is the best in the world because you were born in it, but it turns out the situation is quite different.

    Just four of the ten countries put their local producers first when searching for wine, while some countries even had merchants who did not stock most local wines.

    Let’s get the traditional chauvinists out of the way first. The word « chauvinist » comes from France, as does our accepted wisdom as to what is good and bad when it comes to wine. France, ably abetted by the wine writers and wine merchants of Britain, effectively dictated the quality standards that have been handed down to us across the past two centuries, and mostly swallowed wholesale by people who only relatively recently began to look at this wine hierarchy as something of a long con.

    Mon vin c’est moi (Avoine 1990)

    And France certainly behaves according to the form guide.

    Interest among French users of Wine-Searcher is massively weighted in favor of the local plonk — more than 85% of all searches from that country are for French wine, a percentage far in excess of any other. Retailers are, if anything, even more chauvinistic than French users, with a whopping 90.42% of all offers in France represented by French wines.

    Those retailers are not, however, the most nationalistic; that award goes – perhaps surprisingly — to Chile, where 93.38% of all wines on offer are local. That reflects something of a lack of interest in imported wines — 62.1% of all searches in Chile are for Chilean wines.

    The Chilean locals are clearly happy with what their own wineries are serving up, while the rarity and subsequent expense of imported wines clearly acts as a deterrent.

    Almost as parochial are the merchants of Argentina – 91.42% of all offers there are for local wines, a reflection of both confidence in the local product and the difficulties of importing non-essential goods given the yoyo nature of the local currency. That does not prevent Argentinians from dreaming, however. Only 43.5% of searches are for local wines, suggesting that while the economy there might well be in the gutter (again), wine lovers are looking to the stars.

    The US is an interesting case, too, all the more so given its status as the world’s biggest wine market. It’s an odd situation, in a way; the US is famously fond of its own wine. With a total wine market worth $70 billion, domestic consumption stands at 67%, or $47.2bn; exports account for just $1.47bn.

    Nevertheless, US merchants are some of the most non-partisan retailers in the world. US wines account for 43.67% of all wines on offer through the US retailers listed with Wine-Searcher. That’s the second-lowest figure for domestic wines in the 10 countries we looked at. It reflects a slight oddity in the search figures. While 67% of wines consumed in the US are local, just 36% of US searches are for US wines, with France consuming a similar share and Italy a little way behind in third place.

    Speaking of Italy, it is another country with a strong sense of national pride, especially among retailers. Some 81% of wines on offer are Italian, even though searches are a relatively restrained 59.75% in favor of local producers.

    Australia and Portugal also have a strong locavore element, with domestic wines accounting for 61.5% and 88.3% of offers, respectively, while searches come down in favor of the home side at 56.7% and 52.3%, respectively.

    Spain’s wine lovers are looking beyond Ribera del Duero and Rioja for their wines, with only 33.7% of searchers looking for Spanish wines, while 70% of wines on offer are domestic.

    New Zealand’s situation reflects the fact that it is a small and quite remote country — 64% of searches are for overseas wines, while only 50% of wines on offer come from outside New Zealand, and the majority of those are from Australia. 

    The most interesting of all the major international wine-producing markets, though, is Germany, which has long been a strong market for French and Italian producers. Just 18.75% of wines listed by retailers there are German, while a tiny 6.15% of all searches were for domestic wines.

    We will look at how this mix of parochialism and all-embracing internationalism is affecting major producing regions in the near future, but for now let’s raise a toast to the Germans, the less chauvinistic champions of global wine.

    Tweet
  • CONSTANCE DU VIN DE CONSTANCE (2)

    par Daniel J. Berger | Fév 7, 2020

    Présenté au dernier Grand Tasting de Bettane+Desseauve au Carrousel du Louvre, le Vin de Constance est un blanc liquoreux, produit depuis plus de trois siècles dans la province du Cap en Afrique du Sud. Ce vin mythique et méconnu a inspiré de grands écrivains et été convoité par les têtes couronnées d’Europe au XIXème.

    Après le désastre du phylloxéra qui l’a plongé dans un long sommeil, c’est au XXIème siècle qu’il retrouve son essentielle constance, qui le fait considérer de nos jours comme l’un des plus grands vin du monde. Histoire de sa naissance, de sa mort et de sa résurrection

    XVIIème — XIXème siècle

    Simon Van der Stel, gouverneur de la colonie du Cap nommé par la Compagnie des Indes Orientales, débarque en Afrique du Sud en 1679. Il s’y installe définitivement en 1685, dans la région du Cap, colonie des Pays Bas alors Provinces-Unies. Il va y planter un vignoble de plus de 750 hectares sur le domaine légué par la compagnie néerlandaise.

    C’est un véritable vigneron, qui a entamé des travaux sur le Brande Vjin ou « vin brulé », le futur Brandy.  Au Cap, sa propriété qui va bientôt compter 70 000 pieds de vigne prend le nom de Constantia et le premier vin qui en sort en 1692, celui de Vin de Constance, prénom de son épouse, nom qui a perduré depuis.

    Le père du vin de Constantia décède en 1712 et le domaine est alors divisé en trois : le terrain de sa famille renommé Groot (grande) Constantia, celui de Klein (petite) Constantia et celui de Bergvliet. Chaque domaine va être administré séparément.

    Le domaine est repris en 1778 par un viticulteur de Stellenbosch, Hendrik Cloete, digne successeur de Van der Stel, hollandais et protestant comme lui. Il construit un nouveau chai et plante 10 000 pieds de cépages déjà implantés en Afrique dont le muscat de Frontignan, les muscat rouge et muscat blanc, le pontac rouge (d’origine bourguignonne, sans doute un pinot), et un peu de steen druyf (chenin blanc, appelé ainsi depuis longtemps en Afrique du Sud).

    Peinture murale à Groot Constantia

    Il accueille de nombreux visiteurs dans sa cave, comme la Britannique Lady Anne Barnard dont la famille va se sédentariser et devenir célèbre en Afrique du Sud, qui tombe en pâmoison devant une scène de foulage : « les corps antiques à peau de bronze, perpétuellement changeants et gracieux, dansent à moitié nus dans le pressoir et battent le tambour (si l’on peut dire) avec leurs pieds, parfaitement en rythme » à la surface du moût en haut des foudres.

    Napoléon Ier aurait presque pu en boire

    Au XIXème siècle, Hendrik Cloete va élever ce vin du Cap de Bonne Espérance à un haut niveau de qualité et le révéler au monde entier. Napoléon s’en fait expédier à Sainte Hélène et en boit dit-on une bouteille (50 cl) par jour (en 2016 une bouteille de 1821, qu’il aurait presque pu déguster, a été vendue 1 550 €). Les rois Louis Philippe, George IV ou Frédéric II, ainsi que Bismarck, sont de fervents consommateurs. Le Vin de Constance conquiert les grandes tables d’Europe rivalisant désormais avec les Madère, Tokaj et Château Yquem, auréolé en plus de son mystère de vin du bout du monde.

    Plusieurs grands écrivains y font référence comme Jane Austen (dans Sense and Sensibility elle évoque son « pouvoir de guérison des déceptions du cœur « ); Dickens (Le Mystère d’Edwin Drood); Baudelaire, qui aurait rendu visite à Constantia (Les Fleurs du Mal XXVI): ou encore J. K. Huysmans (À rebours).

    XXème siècle : dévastation et résurrection

    À partir de 1860 l’oïdium puis le phylloxéra vont dévaster quasi entièrement la viticulture occidentale, et celle du sud de l’Afrique n’y échappera pas : les faillites des propriétés viticoles s’y succèdent, Constantia périclite, en 1885 le domaine devient propriété du gouvernement sud-africain qui le transforme en institut agricole puis en musée…

    Après un siècle d’inertie si ce n’est d’abandon, la propriété est acquise en 1980 par la famille Jooste qui, avec l’aide de l’œnologue Chris Orffer, professeur à l’Université de Stellenbosch, décide de recréer le vin doux historique. La pourriture noble (botrytis cirenea) n’étant pas présente au Cap à l’époque de l’original, l’équipe va élaborer un vin de vendange tardive ou « surmaturé » comme on dit en Suisse, à partir de muscat blanc à petits grains dit de Frontignan. L’élaboration n’est pas sans risques — faible rendement (réduction de la récolte de 50%), nombreux passages dans la vigne nécessitant une main-d’œuvre nombreuse lors des « tries » successives des raisins à la vigne et au chai. Les premières plantations ont lieu en 1982 et l’ère nouvelle de Klein Constantia date de 1986 avec les premiers essais et en 1900 sort officiellement la première bouteille de « pur vin doux, doré presque ambré, aux arômes intenses, avec une bonne teneur en alcool et une persistance douce et longue. »

    Klein Constantia au XXIème siècle

    Le Muscat de Frontignan d’Afrique du Sud

    Aujourd’hui 10 domaines produisent du vin de Constantia sur une superficie de 1 500 ha de terroirs parmi les plus intéressants de l’hémisphère sud, à mi-chemin entre l’océan atlantique et l’océan indien, dans un climat frais, froid par périodes, pluvieux et venté (les vignes doivent être attachées).

    En 2011, les investisseurs Charles Harman et Zdenek Bakala rachètent la marque Klein Constantia et définissent un modèle économique. D’illustres Bordelais comme Hubert de Boüard (Château Angelus) et Bruno Prats (ex Cos d’Estournel, Clos de los Siete en Argentine, entre beaucoup d’autres) deviennent actionnaires du domaine dirigé par le Suédois Hans Astrom et managé par l’œnologue Matthew Day. Le vignoble s’étend sur 145 hectares dont 40 de vignes en coteaux pentus, à une altitude entre 10 et 350 m. Cent vingt personnes travaillent au domaine, car chaque pied de vigne est traité individuellement.

    Huit hectares de muscat sont plantés sur les pentes du Constantiaberg (ressemblant aux coteaux de l’Hermitage) face à la baie False, sur des sols évoluant du grès d’éboulis sablonneux et rocheux au sommet, à l’argileux plus riche sur granit décomposé à mi-hauteur (rappelant le sous-sol du beaujolais), et aux sables en bas.

    Les vendanges sont opérées à partir de 4h du matin, à la main, baie par baie et mises aussitôt dans la glace. 10% de la superficie sont récoltés d’abord pour constituer le vin de base à 12,5–13° avec une bonne acidité. Vient le tour des raisins déjà secs. Puis des raisins restants qui sont débarrassés de leurs feuilles pour améliorer leur exposition au soleil et favoriser l’accumulation de sucre. Une fois amollis et flétris, ils sont cueillis en plusieurs fois jusqu’à fin mars, c-à-d au milieu de l’automne. Les années difficiles, le nombre de passages peut monter jusqu’à quinze par parcelle.

    La production d’aujourd’hui

    Une partie du domaine est conduite en biodynamie car les vignes sont naturellement assainies par les vents dont cette fameuse brise surnommée Cape Doctor, bonne pour la santé des humains comme des plantes. Sur les quinze dernières années, trente hectares ont été replantés.

    Le domaine produit aussi 25 000 bouteilles de Metis, un sauvignon blanc aux arômes de citron et de pierre à fusil, d’une grande fraîcheur, développé avec le vigneron de Sancerre Pascal Jolivet (auprès duquel on peut se procurer du Constantia).
    Ainsi que 40 000 bouteilles d’un cabernet sauvignon fruité et subtilement épicé.
    Et enfin un rosé et un effervescent.
    À cette gamme s’ajoute la production d’Anwilka, domaine de Stellenbosch, Est du Cap.

    VIN DE CONSTANCE : RAPPEL

    Le Vin de Constance est un liquoreux, sans botrytis cirenea — contrairement à Yquem, un temps son rival-à-prix-inatteignable, aux Quarts de Chaume d’Anjou ou aux grands Alsace vendanges tardives. Il n’est pas « muté » par ajout d’alcool (stoppant la fermentation pour garder une teneur élevée en sucre qui hausse le degré d’alcool) comme dans les « Vins Doux Naturels » (bizarrement ainsi dénommés car ils n’ont rien de naturel), par exemple les Porto, Banyuls, Moscatel qui peuvent titrer 20° et plus.
    Deux versions du Constantia ont bien existé aux siècles précédents, la première non mutée pour la consommation locale (titrant 14° maximum) et la seconde mutée (ou « fortifiée ») pour les marchés à l’export, car jusqu’au milieu du XIXème siècle, on ajoutait couramment de l’alcool aux vins transportés par bateau.

    Sources : Jill Baikoff, Wine Anorak

    Plus d’informations :

    https://www.planetwine.co.nz/planet-wine-blog/the-constantia-estate-which-won-over-napoleon-nelson-and-european-high-society/

    Tweet
« Entrées précédentes
Entrées suivantes »

Langage :

Recevoir l’actualité de Mton vin.net !

Loading

TAGS

Bio-Biodynamie (29) Bordeaux (35) Bordeaux en primeur (7) Bourgogne (16) Californie (6) Canada (16) Cercle Mtonvin (31) Champagne (7) Chine (14) Château Trébiac (8) Climat (10) Concours de vins (12) Crus Bourgeois (6) Cuvée spéciale (8) Espagne (17) Festival Musica Vini (29) Giboulot (5) Goût du Vin (9) Graves (16) Greek wines (9) Humour (8) Israel (8) Italie (19) Japon (5) Languedoc-Roussillon (9) Le vin et l'histoire (16) Littérature (41) Loire (12) Médoc (5) Pessac-Léognan (9) Politique (11) Portugal (5) Rioja (6) Robert Parker (8) Santé (15) Sauternes (6) Siliakus-Sablet (16) Séville (5) U.S.A (11) Vignerons Français (18) Vin et Cinéma (8) Vin et Musique (26) Vin et Religion (9) Vins du monde (58) Voyages-Dégustations (54)

Derniers Articles

  • IVAN MASSONNAT ET LA PAULÉE D’ANJOU
  • ANJOU: LA PAULÉE PREND DE L’AMPLEUR
  • SIGOGNAC: LE VIN ET L’HOMME (2)
  • SIGOGNAC: LE VIN ET L’HOMME (1)
  • MUSICA VINI 9ème ÉDITION LE 10.09
  • 14 MUSCLES POUR 1 BOUCHON
  • CUVÉE SPÉCIALE n°8: FICHE TECHNIQUE

Tous les posts

  • août 2022 (1)
  • juillet 2022 (3)
  • juin 2022 (2)
  • mai 2022 (3)
  • novembre 2021 (1)
  • septembre 2021 (1)
  • août 2021 (1)
  • mars 2021 (1)
  • février 2021 (1)
  • janvier 2021 (1)
  • octobre 2020 (2)
  • juin 2020 (3)
  • mars 2020 (2)
  • février 2020 (2)
  • janvier 2020 (4)
  • décembre 2019 (3)
  • novembre 2019 (8)
  • octobre 2019 (3)
  • septembre 2019 (1)
  • août 2019 (4)
  • juillet 2019 (4)
  • juin 2019 (3)
  • mai 2019 (5)
  • avril 2019 (3)
  • mars 2019 (6)
  • décembre 2018 (4)
  • septembre 2018 (2)
  • août 2018 (2)
  • juillet 2018 (1)
  • mai 2018 (1)
  • avril 2018 (2)
  • mars 2018 (3)
  • février 2018 (3)
  • janvier 2018 (2)
  • décembre 2017 (1)
  • septembre 2017 (1)
  • août 2017 (2)
  • juillet 2017 (1)
  • juin 2017 (3)
  • mai 2017 (4)
  • avril 2017 (4)
  • mars 2017 (9)
  • février 2017 (10)
  • janvier 2017 (7)
  • avril 2016 (3)
  • décembre 2015 (4)
  • novembre 2015 (3)
  • octobre 2015 (4)
  • septembre 2015 (2)
  • août 2015 (8)
  • juillet 2015 (2)
  • juin 2015 (1)
  • avril 2015 (3)
  • mars 2015 (9)
  • février 2015 (12)
  • décembre 2014 (5)
  • novembre 2014 (1)
  • octobre 2014 (6)
  • septembre 2014 (1)
  • août 2014 (7)
  • juillet 2014 (4)
  • juin 2014 (5)
  • mai 2014 (3)
  • avril 2014 (3)
  • mars 2014 (9)
  • février 2014 (13)
  • janvier 2014 (6)
  • décembre 2013 (1)
  • novembre 2013 (3)
  • octobre 2013 (8)
  • septembre 2013 (8)
  • août 2013 (13)
  • juillet 2013 (6)
  • juin 2013 (2)
  • mai 2013 (9)
  • avril 2013 (7)
  • mars 2013 (3)
  • février 2013 (3)
  • janvier 2013 (9)
  • décembre 2012 (4)
  • novembre 2012 (3)
  • septembre 2012 (2)
  • août 2012 (2)
  • juillet 2012 (4)
  • juin 2012 (5)
  • mai 2012 (3)
  • avril 2012 (7)
  • mars 2012 (6)
  • février 2012 (2)
  • janvier 2012 (1)
  • décembre 2011 (4)
  • octobre 2011 (2)
  • septembre 2011 (1)
  • août 2011 (3)
  • juillet 2011 (7)
  • juin 2011 (10)
  • mai 2011 (13)
  • avril 2011 (2)
  • mars 2011 (7)
  • février 2011 (11)
  • janvier 2011 (12)
  • décembre 2010 (16)
  • novembre 2010 (3)
  • octobre 2010 (11)
  • septembre 2010 (3)
  • mai 2010 (4)
  • avril 2010 (5)
  • mars 2010 (8)
  • février 2010 (11)
  • janvier 2010 (13)
  • décembre 2009 (15)
  • novembre 2009 (13)
  • octobre 2009 (5)
  • septembre 2009 (1)
  • août 2009 (1)
  • juillet 2009 (5)
  • juin 2009 (5)
  • mai 2009 (7)
  • avril 2009 (9)
  • mars 2009 (13)
  • février 2009 (14)
  • janvier 2009 (16)
  • décembre 2008 (6)
  • novembre 2008 (3)
  • octobre 2008 (1)
  • août 2008 (1)
  • juillet 2008 (3)
  • juin 2008 (5)
  • mai 2008 (9)
  • avril 2008 (18)
  • mars 2008 (1)
  • février 2008 (1)
Copyright Mtonvin 1999 -2019 - D.Berger - Paramétres de confidentialité - Développement Agence Exotikarts