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  • LES VIGNERONNES DE SETÚBAL (3)

    par Daniel J. Berger | Nov 11, 2019

    PEGÕES, 4ème COOPÉRATIVE DU PORTUGAL

    Après la success story de la famille de Freitas, due en particulier à la quatrième de la lignée des femmes qui ont fait de leur entreprise vinicole un emblème de réussite — illuminant le visage des collaborateurs dès qu’ils parlent d’Ermelinda Freitas de Fernando Pó —, voici une autre réussite, celle de la Coopérative de Pegões créée ex nihilo il y a 60 ans.

    Situation de Santo Isidro de Pegões dans la région de Palmela, en haut à droite du plan

    Son nom complet est Cooperativa Agrícola Santo Isidro de Pegões. Santo Isidro, le saint des paysans, qui donne son nom à l’église de l’immense domaine donné à l’Etat portugais à la fin des années 1950 par son propriétaire, le magnat de la bière José Rovisco Pais.

    Le gouvernement de l’époque avait alors mis en œuvre un programme de « colonisation », attribuant les terres pour rien aux travailleurs agricoles et plantant plus de 800 hectares de vignes. La coopérative a été créée pour gérer les récoltes et structurer la production de vin.

    C’était bien avant la « révolution de velours » qui a entraîné à partir de 1974 un mouvement en profondeur de redistribution de la propriété au Portugal, souvent dans un grand désordre notamment à Pegões, qui a stagné pendant de nombreuses années.

    Cette période est bel et bien terminée : 15 millions € ont été investis dans de nouvelles installations de vinification, de production (presses, embouteillage et conditionnement), de stockage (3 000 barriques de vieillissement réparties en plusieurs chais), et dans les accès (réception des vendanges, livraison, etc.). L’ensemble est spectaculaire et le résultat impressionnant.

    Une centaine de coopérateurs exploitent ici 1 200 hectares. En 2018, leur coopérative a produit 16 millions de bouteilles. « Il y a une liste d’attente d’une soixantaine de vignerons qui veulent nous rejoindre, » précise Eva, une jolie femme sure d’elle-même qui, comme celles de la Casa Ermelinda Freitas, est passionnée par son travail, attentive, convaincante, volubile (en anglais): «  la demande est bien supérieure à l’offre et nous prévoyons de passer à 18 ou 19 millions de bouteilles dans  3-4 ans. »

    Notre guide, Eva, compétente et maîtresse femme

    Après m’avoir montré les gigantesques cuves inox verticales en extérieur, elle mène tambour battant la visite des chais et des bâtiments de production sillonnés en tous sens par de jeunes femmes caristes, pour arriver au salon de dégustation où nous attend une dizaine de bouteilles. Il est 17:30, il va falloir faire vite.

    La production est à 60% vin rouge, 30% blanc dont la moitié d’effervescent, et 10% rosé, dont la proportion ne cesse d’augmenter. Le terroir « pliocénique » est celui décrit hier à Palmela par Henrique Soares : situé entre les deux réserves naturelles formées par les estuaires du Tage et du Sado, essentiellement sableux, posé sur un réservoir d’eaux souterraines, les vignes sont bien protégées par les collines de l’Arrabida —, climat méditerrannén tout proche de l’Atlantique, dans un décor majestueux propice à l’œnotourisme.

    San Isidro de Pegões, proche de Fernando Pó (Casa Ermelinda Freitas)

    Exportation pour 35% de la production dans 40 pays dont une bonne partie en Afrique ex-lusophone et au Brésil. Classée 37ème coopérative du monde et 4ème au Portugal. Nombre incalculable de médailles d’or dans les concours internationaux.

    LA DÉGUSTATION porte sur les rouges monocépage (100 % d’un même) d’Adega de Pegões, l’une des sept gammes de la coopérative. Les vins titrent 14°.

    Merlot 2016 (4 €) : le premier des 7 frères de cette gamme monocépage à avoir été produit (étiquette identique, de couleur différente pour chacun); aragonez 2016, créé en 2004 (4 €); syrah 2017, le plus populaire (4 €) — le 2ème vin, tout à fait honorable, plus léger, est à 2,50 €; touriga nacional 2017 (5,60 €); trincadeira 2015 ci-contre (5,60 €); alicante bouschet 2016 (5,60 €); cabernet sauvignon 2016 (5,60 €) : comparé à des CS français notamment bordelais, où ce cépage est considéré dans certaines parties, le libournais par exemple, comme « tardif  » et « long à murir » et qui peut se montrer parfois un peu rude dans les assemblages, il est là léger, d’une rectitude remarquable, ample en bouche, fin et racé, désaltérant (****/5).

    La dégustation des rouges monocépage est complétée par celle d’un blanc 2018 : assemblage équilibré bien que complexe (30% fernão pires, 25% antão vaz, 25% verdelho, 10% arinto, 10% chardonnay), sans grande typicité, goût international. D’un rouge Sélection (25% touriga nacional, 25% trincadeira, 25% cabernet sauvignon, 25% syrah) sans véritable personnalité (7,50 €). Et d’un Grande Reserva produit juste à 10 000 exemplaires (syrah 35%, touriga nacional 30%, aragonez 20 %, alicante bouschet 15%), puissant, à attendre (14,5°, 15 €). Et clôturée par un moscatel de Setúbal 100% (17,5°, 4,50 €).

    Les vins de la Coopérative de Pegões sont en vente à Auchan, Intermarché, Lidl


    PROCHAINE ÉTAPE : QUINTA do PILOTO

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  • LES VIGNERONNES DE SETÚBAL (2)

    par Daniel J. Berger | Nov 7, 2019

    ERMELINDA FREITAS, UN VRAI SUCCÈS FÉMININ

    La propriété située à Fernando Pó est créée par Déonilde de Freitas en 1920 (à gauche), dans une période de troubles politiques et de désordres économiques de la 1ère République du Portugal.

    Elle la la première femme à cultiver la vigne dans la région.

    Le vignoble devait revenir à son fils, Manuel João de Freitas, mais il meurt prématurément, le laissant à son épouse, Germana (à droite). Avec dynamisme et esprit d’entreprise, la 2ème femme de la lignée agrandit le vignoble à 60 hectares.

    Le fils de Germana, Manuel, disparaît à son tour, et la propriété passe aux mains du mari de sa fille Ermelinda, qui doit prendre la direction de la société quand il décède.

    C’est alors sa fille unique Leonor (1ère à gauche) qui lui succède, quatrième femme à diriger l’entreprise.

    Sa fille Joana, 30 ans (2ème à droite) et 5ème femme de Freitas se prépare à prendre le relais : « après on ne sait pas, » dit-elle en souriant.

    Le destin tragique des hommes a-t-il été le moteur du succès des femmes de cette famille ?

    La partie la plus récente de l’histoire commence à la fin des années 1990 lorsque Leonor de Freitas vient orchestrer l’entreprise avec autant d’agilité que de fermeté. Sous sa conduite, de régionale Casa Ermelinda Freitas devient une société nationale puis internationale, exploitant directement et avec ses viticulteurs partenaires, environ un millier d’hectares, produisant 16 millions de bouteilles et exportant dans le monde entier. La croissance de l’entreprise, où toute la famille travaille, est loin d’être terminée, visant 20 millions de bouteilles dans un futur proche. Casa Ermelinda Freitas vient d’acheter des terres plus au nord, près des rivières Douro et Minho, s’implantant dans trois grandes régions viticoles du Portugal.

    L’ancien chai en ciment, intégré au musée de la Casa Ermelinda Freitas

    Tout le monde s’attendait à ce que son gendre reprenne l’affaire, mais ce n’est pas son mari, c’est elle, Leonor, qui s’impose. Elle entend changer le modèle de l’entreprise : « je voulais innover, faire d’Ermelinda Freitas une vraie marque, élargir la variété de l’encépagement au-delà du castelão et du fernão pires. Mais je devais faire attention aux comportements et aux subtilités du secteur, j’étais surveillée par tout le monde et sur tout, » se souvient-elle, « et j’ai du affronter les professionnels, y compris des cousins qui exhortaient ma mère à se ressaisir si elle voulait ne pas mener notre société à la faillite. » En plus, Ermelinda alors propriétaire officielle, était terrorisée à l’idée que sa fille change le cours traditionnel de l’entreprise, stable depuis 70 ans.

    L’éclairage de ce chai varie de couleur selon les visites, mauve pour celle d’un groupe féminin.

    Tout cela n’arrête pas Leonor, au contraire. Elle lance de nouvelles marques, modifie la chaîne de production pour améliorer la qualité et créer un chai ultramoderne (ci-dessus). Elle doit se séparer, la veille des vendanges, de l’œnologue de la famille, qui n’est pas d’accord avec les innovations de « la citadine–pleine-d’idées-qui-va-bientôt-comprendre-sa-douleur-et-abandonner. » Leonor et son mari doivent mettre aussitôt la main à la pâte, « l’un des nombreux défis qu’elle a relevés, » déclare Jaime Quendera, jeune œnologue de 27 ans sans expérience quand Leonor (tous les deux ci-dessous) le fait venir au moment crucial et auquel elle va accorder sa confiance, entièrement et sans discontinuer jusqu’à aujourd’hui.

    Il ajoute: « lorsque Leonor a émergé, les producteurs de la région n’ont rien vu venir, ils ne pouvaient concevoir qu’une femme et un débutant puissent réussir. Il faut dire que ce qui semble évident aujourd’hui, passer du vin en vrac au vin en bouteille, ne l’était pas du tout alors, » rappelle-t-il, également responsable aujourd’hui du vignoble de la coopérative Pegões, et d’autres, devenu l’un des plus célèbres œnologues de la région Palmela-Setúbal.

    Au début de la mise en place du bag in box les maisons de négoce clientes du vrac « ont pensé que c’était une blague, envoyant avertissements et alertes : nous allions dans le mur, » soupire Leonor. « Début 2000, la société qui nous achetait l’essentiel de la production, en vrac toujours, a coupé les ponts, nous plongeant dans l’insécurité financière pendant deux ans. »

    Leonor veut savoir ce qui se fait dans le monde des vins en bouteille. Avec sa Clio de société, elle part à Bordeaux pour mieux comprendre le savoir-faire des Châteaux, se familiariser avec les nouvelles techniques et les installations modernes, mieux saisir l’importance et la valeur des marques : « cette première visite a été une étape importante, j’ai appris à apprécier le Bordeaux et j’ai vu à quel point les Français le respectent. J’en suis revenue avec un regard différent, j’avais beaucoup appris et la chose dont j’étais sûre, c’est que je ne savais pas… Et dans mon travail,  je ne me suis jamais éloignée de cette humilité. Je souhaite rester « la dame du castelão de Palmela, » le meilleur castelão je pense, cela ne tient pas à moi mais aux trois femmes qui m’ont précédée et qui nous ont laissé de très bonnes vignes. »

    Une partie de l’équipe féminine de Leonor de Freitas

    Elle a surmonté les nombreux obstacles dressés devant elle, comme le manque de confiance à commencer par les collaborateurs qui pensaient que le projet ne marcherait pas. Les pressions notamment envers sa mère toujours propriétaire, qui était bombardée d’alertes traumatisantes : « attention, votre fille a investi le capital de la société, son épargne et ses réserves, et elle a dû recourir à des emprunts bancaires, vous risquez gros. » La bureaucratie qui a fait attendre quatre ans son projet d’expansion pour cause de POS et de schéma directeur municipal, contraignant son équipe à camper dans un entrepôt sous une tente de mariage. La frilosité des propriétaires terriens pour soutenir les vignerons auxquels la société achète leurs raisins, en les aidant à respecter un cahier de charges pour atteindre le niveau de qualité des vignes de la propriété : « ils ont d’abord pensé que c’était une ingérence inacceptable dans leurs pratiques ancestrales. Cela a depuis bénéficié à tout le monde, et en premier lieu au consommateur. »

    Leonor teste un Moscatel vieilli dans une grotte souterraine

    « C’est une force de la nature, rien ne l’arrête, » affirme Lurdes Atalaia, présidente de l’Association des viticulteurs de Palmela (AVIPE), que Leonor avait présidée elle-même, lui insufflant son esprit d’innovation. Elle a imaginé avec pertinence ses gammes de produits, su instaurer le travail d’équipe en valorisant la place respective des salariés dans la chaîne de production et a développé un sens aigu du rapport qualité/prix.

    « Un sens aigu du rapport Q/P »

    « Par son engagement, son enthousiasme, sa détermination et sa puissance de travail, Leonor a été ces quinze dernières années précurseur du grand retournement de Palmela-Setúbal,» assure Lurdes Attalaia, ajoutant « Casa Ermelinda Freitas a montré l’exemple aux producteurs de la région, à laquelle Leonor a apporté une réelle notoriété. »

    Tout cela lui a valu d’être décorée par le président de la République Cavaco Silva venu à Fernando Pó en 2009 lui remettre l’Ordre du Mérite Agricole. Et elle a été reçue par le Pape François au Vatican.

    Sources : Forbes Portugal, Manufacturing Journal, entre autres.

    FAITS ET CHIFFRES

    2 chais : de 1 500 barriques pour fermentation et vieillissement des rouges, rosés, blancs, effervescents; et de 2 000 barriques pour le Moscatel.

    3 lignes d’embouteillages, d’une capacité de 3 000 b/h pour l’une; et 2 de 800/h pour le BIB.

    12 gammes soit 54 vins en bouteilles et 8 en BIB.

    29 cépages dont 40% de castelão.

    40 salariés, dont une majorité d’emplois féminins.

    550 hectares de vignoble, l’équivalent de 455 terrains de football.

    Un musée de l’histoire de l’entreprise.

    Un hébergement œnotouristique.

    Un programme de mécénat et de soutien des artistes et d’animations régionales à caractère artistique.

    DÉGUSTATION 11 OCT 19

    La gamme monocépage, dont le syrah classé en 2004 meilleur vin rouge du monde aux ‘Vinalies Internationales’

    La dégustation à Casa Ermelinda Freitas a couvert une variété de vins milieu et haut de gamme :

    — un effervescent (85% Fernão Pires, 15% arinto), sur les 4 de la gamme (7 €);

    — un rosé 2018 (pinot-merlot), sur les 7 (9 €);

    — deux blancs, un 2018 de la gamme Dona Ermelinda (Fernão Pires, arinto, antão vaz, chardonnay, 4 €) et un 2018 sauvignon-verdelho (9-10 €), sur les 13;

    — trois rouges, un syrah 2017 14° (10 €); un Quinta de Mimosa 2016, 100% castelão, vignes de 60 ans, 3 ans de bouteille : beau vin puissant, mûr et jeune à la fois, frais, persistant (10 €); et un 100%  petit verdot (10 €) qui aurait pu apparaître comme une curiosité, mais que j’ai trouvé très réussi; l’offre Ermelinda Freitas compte 31 rouges en tout;

    — un Moscatel de Setúbal 2009 de très grande classe (35 €), fraîcheur mentholée, large palette aromatique dont la figue, les zests d’agrumes. La gamme en compte 3 : Moscatel, Moscatel Superior, Moscatel Roxo Superior.

    ______________________________________

    Casa Ermelinda Freitas rue Manuel João de Freitas – Fernando Pó 2965-595 Águas de Moura E-mail: geral@ermelindafreitas.pt Tel: (+351) 265 988 000 www.ermelindafreitas.pt GPS: 38.635646, -8.689499


    PROCHAINE ÉTAPE : COOPÉRATIVE DE PEGÕES





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  • LES VIGNERONNES DE SETÚBAL (1)

    par Daniel J. Berger | Oct 31, 2019

    Au Portugal, le salon VINIPAX qui s’est déroulé dans l’Alentejo, à Beja, a été l’occasion pour l’organisateur, l’œnologue Anibal Coutinho, vigneron à Sintra, de convier la presse européenne à un tour des régions viticoles du sud de Lisbonne, entre les estuaires du Tage et du Sado. On m’avait attribué la péninsule de Setúbal, qui comprend trois appellations dont Palmela, la plus importante.

    Pourquoi ce titre « Les vigneronnes de Setubal » ? Eh bien, en souvenir du nanar catastrophique de Luis Mariano « Les lavandières de Setubal » qu’on entendait à la radio au milieu du siècle dernier… Et parce que les femmes sont bien présentes ici dans le monde du vin. Suivons le guide.

    La culture de la vigne remonte à une période beaucoup plus ancienne que la formation même du Portugal. On dit qu’ont été retrouvés lors de récentes fouilles archéologiques sur la Péninsule de Setúbal, des pépins de raisin datant du VIIIème siècle avant J. C.! La vigne a été cultivée dans la vallée du Sado environ 2 000 ans avant J. C. et le vin a été utilisé dans les échanges commerciaux par les Phéniciens autour de 1 000 ans avant J. C.

    Setúbal, la ville, est une merveille de couleurs, de senteurs, de sites contrastés et d’un habitat coloré et bien conservé : le marché aux poissons, les dauphins au large, les plages et… les vignes : on recommande les excursions œnologiques à Setúbal et Palmela et à Serra da Arrábida, Sesimbra, Azeitao…

    La Maison de la route des vins à Palmela qui est aussi un lieu de dégustations éclairées, indique les itinéraires dans les vignobles — Montijo, Alcácer do Sal, Grândola, à pied, en voiture ou en bateau.

    Deux appellations, Sétúbal et Palmela.

    Setúbal produit le fameux vin de liqueur entre 17 et 18°, le moscatel, version moscatel de Setúbal ou moscatel roxo, issus de clones du muscat d’Alexandrie, l’un des cépages les plus aromatiques du monde, puissant au nez et capiteux en bouche, un magnifique vin « de dessert » intense et persistant, dont la couleur ambrée fonce avec l’âge et qui peut vieillir un siècle. Il s’étend sur une superficie d’environ 500 ha, soit 6-7% de la production de la région mais 14-15% en valeur.

    Rendu célèbre par les rois Richard II d’Angleterre et Louis XIV jusqu’à Robert Parker qui l’a noté 100/100 en 2011 et les concours Muscats du Monde à Frontignan où le Moscatel de Sétúbal s’est classé trois fois en tête et se tient dans les cinq premiers chaque année sans discontinuer. Autant que le Porto, Le Moscatel de Setúbal est un monument de l’histoire du vins portugais.

    J’en ai goûté plusieurs et c’est à chaque fois une révélation d’une grande sensualité. Note de dégustation trouvée sur place : « de couleur dorée, qui va du topaze clair à la couleur ambre et avec des arômes floraux et exotiques, rappelant la fleur d’oranger et le tilleul, parfois la rose, avec des tons de miel. Des arômes d’agrumes (citron), de litchi, de poire mure et de datte dans les jeunes et, pour les vieux de 20-25 ans, des arômes plus complexes et subtils de raisin de Corinthe, de noisette, d’amande et de noix. »

    Et Palmela, jadis monopolisée par trois grands producteurs et deux gigantesques coopératives, que nous allons visiter, aujourd’hui répartie en une trentaine de marques. Les vignes sont plantées sur deux terroirs : sols argilo-calcaires pour les coteaux escarpés de montagne dont l’Arrábida (jusqu’à 500 m) et sur de petits coteaux à faible altitude (150 m). Et sols pauvres et sableux dans la grande plaine traversée par les rivières Sado, Sorraia et Almançor.

    De nombreux cépages en rouge, le castelão (prononcer castelan) appelé localement periquita du nom de la propriété où il a été planté (en 1840 par José Maria da Fonseca), qui s’adapte bien aux différents types de sols, dominant l’appellation au 2/3. S’y ajoutent pour le tiers restant les aragonez, alicante bouschet, touriga nacional, trincadeira, touriga franca, alfrocheiro notamment; et aussi syrah, cabernet sauvignon, merlot et petit verdot.

    Et pour les vins blancs, qui parviennent à garder de la fraîcheur malgré la chaleur locale, outre le moscatel de Setúbal (à la fois cépage et nom générique), on trouve l’arinto, le Fernão Pires, et aussi le chardonnay et le sauvignon blanc.

    L’Atlantique au large de la péninsule de Setúbal depuis la terrasse de la Pousada du Château de Palmela

    J’écoute Henrique Soares, président de la région vinicole de Setúbal, décrire sa belle région sur la terrasse plein soleil de la Pousada du château de Palmela, et l’on voit à l’horizon la longue et fine barre de Troia fermant presque l’accès au golfe de la péninsule. Bordée par l’océan atlantique, les vignes sont protégées par le parc naturel de l’Arrábida et la réserve de l’estuaire du Sado qui leur procure une biodiversité terrienne et marine : « les vins affichent une salinité caractéristique, très agréable. » Si les sols ocre paraissent secs, ce n’est qu’une impression : « nous n’irriguons pratiquement pas, non que ce soit interdit comme en France mais ce n’est pas nécessaire, les réserves d’eau souterraine fournissent aux raisins l’humidité dont elles ont besoin. »

    La barre de Tróia au centre de la baie

    Dans le vin comme dans bien d’autres domaines au Portugal, c’est l’équilibre et le juste milieu qui caractérisent les crus de Palmela-Setúbal : les vignes bénéficient à la fois d’un ensoleillement et d’une lumière idéales, d’une riche biodiversité entre vallées et collines d’un estuaire à l’autre, et d’une fraîcheur nocturne apportée en permanence par la mer : « nos crus se situent entre les vins atlantiques et les vins méditerranéens, » dit Henrique Soares en souriant.

    Henrique Soares, le sympathique patron des vins de Setúbal

    Henrique m’emmène au centre de Palmela déguster quelques crus à la Maison de la route des vins, dépositaire d’un grand nombre de vins des producteurs partenaires de la région.

    MOSCATEL, le vin d’ici

    C’est surtout sur les liquoreux « generosos » que se porte mon attention, des nectars (nom emmployé souvent ici) qui se mangent autant qu’il se boivent. Il existe de nombreux muscats ou moscatels dans le monde — notamment Douro, Catalogne, Californie, USA et Canada, Australie, Autriche, Italie, Alsace –, mais on s’accorde pour constater que celui de Setúbal est le meilleur de par sa concentration et sa richesse aromatique.

    Moscatel de Setúbal. Cépage muscat d’Alexandrie à gros grains, blanc donc. Le 2016 de la famille Horãcio Simões, l’un des plus grands spécialistes, m’a paru ravissant au sens premier du terme — nez complexe de mure, de fruits confits, de figue, de prune très mure.

    Le corps est onctueux, puissant, gras, d’une rondeur étourdissante, frais, avec une surprenante acidité quand on connaît la dose de sucre.

    Comme le dit le journaliste Hervé Lalau, il s’agit d’un « vin multidimensionnel qui nous emmène au tréfonds de notre bibliothèque sensorielle. »

    Moscatel Roxo (prononcer roujch) de Setúbal. Il s’agit cette fois d’un cépage rouge (baies rose foncé) plus tannique, avec un peu plus d’acidité. Mais la couleur du Venâncio Costa Lima 2014 provient des fûts et l’on ne voit pas trop la différence avec le premier, elle ressemble à celle d’un Armagnac.

    La dégustation est encore plus brillante : un bouquet de fruits à la fois frais et très murs; plus alcoolique aussi, le vin n’est en bouteille que depuis 5 ans et il va devenir à terme une sorte de cognac fruité.

    Les producteurs de Moscatel les plus connus, outre Horácio Simões, sont Bacalhôa, José Maria da Fonseca, Adega de Palmela, Adega de Pegões, Xavier Santana, SIVIPA, Venâncio da Costa Lima, et Casa Ermelinda Freitas que nous allons voir demain.

    Les prix sont très « démocratiques », 14-15 € pour un Roxo de moins de 5 ans, 20-25 € en moyenne pour un Roxo de 10 à 15 ans. 40-50 € pour de très grandes bouteilles chez Horácio Simões.


    PROCHAINE ÉTAPE : CASA ERMELINDA FREITAS, UN VRAI SUCCÈS FÉMININ

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  • DE L’ÉTÉ À L’HIVER

    par Daniel J. Berger | Oct 27, 2019

    Humour

    À PARAÎTRE BIENTÔT : Les vigneronnes de la Péninsule — une série sur la région de Setubal, Palmela + une excursion en Alentejo…

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  • MUSICA VINI AU BORD DE LA SARTHE

    par Daniel J. Berger | Août 27, 2019

    La 7ème édition du festival MUSICA VINI, suite de performances musicales inspirées par la dégustation de vin, se déroulera samedi 7 septembre de 15 h à 19h au château de Pescheseul à Avoise (Sarthe).

    En raison de son intime proximité avec la rivière, auprès de laquelle jouera le Quatuor Bergen, la 7ème édition est intitulée « au bord de la Sarthe »

    TROIS VINS, TROIS ENSEMBLES, TROIS CONCERTS-DÉGUSTATIONS

    15h — DANS L’AILE GAUCHE DES ÉCURIES : ANJOU BLANC SEC et BAROQUE
    Terre de Haut 2016 — Domaine de Bois Mozé, à Couture (Maine et Loire), et
    Duo Juliette de Massy, soprano — Bogdan Nesterenko, accordéon de concert (Bach, Villalobos, …)
    Un vin aigu accordé aux escalades vocales de la soprano Juliette de Massy

    16h30 — DEVANT LE PERRON VÉNITIEN : CLAIRET de BORDEAUX et JAZZ en TRIO
    Château Bellevue 2018 — Yves d’Amécourt, à Sauveterre-de-Guyenne (Gironde), et
    Trio GS de Levi Harvey, piano, Jao Delevallez, basse, Thomas Le Galo, drums (Monk, McCoy Tyner…)
    Le tempo du jazz conjugué avec la vivacité du lumineux clairet

    18h — FACE À LA SARTHE : LALANDE de POMEROL et MUSIQUE DE CHAMBRE
    Château Chatain 2016 — Christine de la Guéronnière, à Néac (Gironde), et
    Quatuor Bergen — M. Klein, S. T. Sarasap, violonn M. Le Thomas, alto, M. Probe, violoncelle
    Le classicisme virtuose du quatuor à cordes (Haydn, Chostakovitch) rencontre celui éclairé du Pomerol

    AUX ENTRACTES — Vente des trois vins participants et des CDs des éditions précédentes

    Plus d’infos et réservation billets (20 €) et dîner optionnel (12 €) sur le site

    musicavini.fr

    Contact : contact@musicavini.fr – 06 2212 3237 – La Bosse 72300 Sablé-sur-Sarthe

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