DANIEL J. BERGER

Parallèlement au développement des pratiques de dégustation, les concours de vin se multiplient de par le monde depuis une vingtaine d’années — plus d’une centaine par an rien que pour la France.
Sur les bouteilles en rayon, les médailles attirent l’œil et incitent à l’achat.

S’ils ont tendance à lisser les résultats en privilégiant les vins « médians » mais par forcément « moyens », les concours en disent long sur la diversité et la qualité des crus du monde, sur la disparité des goûts et des cultures des jurés, et sur les surprises que procurent les vins que souvent l’on croit bien connaître.

Remontée le long du calendrier de cette année sur quelques concours auxquels j’ai participé en France — Citadelles du vin, Amphore des vins bio, Mondial du Sauvignon, Vignerons indépendants, Ligers vins de Loire.

Dans la plupart des concours, les vins sont goûtés à l’aveugle une seule fois, par un jury composé de trois à sept ou huit dégustateurs par séries de 15 à 20 vins de 45′ à une heure. Les jurés sont invités au mutisme durant la dégustation et la notation. Les organisateurs leur conseillent d’attribuer leurs notes en fonction du goût supposé du public plus que du leur, en vue de médailler les vins les plus agréables, marchands, à boire sans attendre.

Un certain nombre de concours pratiquent le suivi aval, en vérifiant de manière aléatoire sur le lieu de vente si le contenu des bouteilles médaillées en rayon est bien semblable à celui dégusté au concours. En France, les services de répression des fraudes ont en effet relevé des anomalies il y a quelques années sur des vins commercialisés en grandes surfaces non conformes aux vins médaillés en concours…

D’autres procèdent à l’analyse des résultats de chaque dégustateur au moyen des relevés sophistiqués comme ceux du Concours Mondial de Bruxelles, afin de vérifier que sa notation ne s’écarte pas trop de la moyenne de son jury. Et un même vin servi deux fois dans une même série permet de vérifier la constance ou la pertinence de notation du dégustateur c-à-d précisément s’il met bien deux fois la même note au même vin.

Le nombre de médaillés s’établit en moyenne à 30% des vins inscrits. Le montant de l’inscription varie en moyenne de 50 à 150 € par bouteille, dont le nombre requis par le concours est en général de trois, parfois  quatre. Le prix des macarons collés sur les bouteilles médaillées varie lui aussi, de 15 à 180 € le mille.

1. LES CITADELLES DU VIN
13ème année. Bourg (Bordeaux)

Dégustation les 17, 18 et 19 mai de 1081 vins provenant de 28 pays (75 % hors France) représentant un potentiel de 83 000 bouteilles commercialisées, soit environ 1 million €.
Prix moyen des échantillons : 12,87 € (en augmentation d’une année sur l’autre).
Selon mon expérience de juré, c’est sans doute le concours le plus prestigieux.
Les dégustateurs sont tous des professionnels très qualifiés.
Nombre de participants optimum : 50 jurés (18 nationalités).
Timing bien étudié laissant le temps aux dégustateurs d’échanger et de se connaître.
Analyse des résultats informatisée immédiate. Réception et organisation impeccables.
Le pari des Citadelles de recherche d’excellence a plus de chances d’être tenu qu’aux concours dix fois plus grands.

Spécificités
Déroulement étendu sur trois jours.
Patronage de l’Organisation Internationale de la Vigne et du vin (OIV ci-contre, l’ex-président Federico Catellucci. Photo Philippe Castex). Membre Vinofed (1).
Verre à dégustation « universel » créé spécialement par Lehmann — Verrerie de la Marne. Remise des prix à Hong Kong le 26 mai à Vinexpo Asia Pacific.

Invité 2014 : Le Brésil
dont les vins ont constitué la surprise, tant les effervescents (prix spécial FIJEV à celui de Casa Valduga Vinhos Finos) que les rouges de la Serra do Sudeste, et de la Serra Gaucha où se concentrent 90% de la production des 80 000 ha du vignoble de ce grand pays de 200 millions d’habitants, qui consomment 2 litres de vin par an à 80% rouges (en réalité : 36 millions de consommateurs; 40% du vignoble produisent du raisin de table).

Résultats
Le concours a décerné 134 médailles d’or et 183 d’argent.
Le tableau ci-dessous indique que sont arrivés en tête les vins français avec 27 Or et 42 Argent pour 285 échantillons présentés, suivis des vins portugais  (26 Or et 38 Argent pour 184 échantillons), espagnols (13 Or et 15 Argent pour 123 échantillons) et chiliens (18 Or et 25 Argent pour 103 échantillons).
Classement complet
En savoir +

(1) VINOFED : association des plus grands concours internationaux regroupant sept d’entre eux : Vinagora (Hongrie), Premios Zarcillo et Bacchus (Espagne), Mondial des Pinots Noirs et Mondial du Merlot (Suisse), Sélections mondiales des vins (Canada).

2. CONCOURS AMPHORE DES VINS BIO
18ème année. Paris.

Le 12 mai 2014 quelque 100 jurés installés rue des terres au curé dans le XIIIème arrondissement, ont décerné autant de médailles à 30 % des échantillons de vins bio et en cours de conversion présentés au concours.

Les organisateurs mentionnent non sans humour que l’édition 2014 remporte la médaille d’or du « palmarès le plus distingué » depuis la création du concours…

Spécificités
C’est peut-être le concours le plus sympathique.
Ouvert aux dégustateurs cooptés et aux copains de son fondateur Pierre Guigui qui en a beaucoup (ci-contre avec son épouse Laurence Zigliara).
Le concours commence par des chansons. Parrain : Marc Jolivet.

Ne croyons pas amoindrie ni dégradée sa raison d’être de départ il y a 18 ans — défendre et promouvoir le bio et la biodynamie dans la viticulture.

Car si la production et la consommation de bio sont en progression régulière dans le monde, si le « vin bio » est désormais enfin labellisé comme tel au plan européen, et s’il a été multiplié par trois en 10 ans à environ 300 000 ha en production (plus de 6 millions hl), il ne représente encore que 2,5% de la production mondiale, dont les ¾ pour l’Espagne, la France et l’Italie.
Et que si la pratique du bio s’est largement étendue à la viticulture traditionnelle : d’une part, les producteurs appliquent de plus en plus la discipline de la culture raisonnée, et réduisent ou retirent de leurs vignes insecticides, pesticides, fongicides qui trucident… et qu’enfin, la liste des produits œnologiques autorisés en bio, qui « aident » la production du vin de la vigne au chai, s’est assouplie et allongée, donnant aux vignerons une plus grande marge de manœuvre, tout en respectant la non agression de la plante et des jus,
on omet souvent de dire que le vignoble français par exemple, continue de consommer 20% des pesticides employés dans l’agriculture alors que sa part n’en représente que 3%. Il reste donc du chemin à faire et la vocation de ce concours Amphore reste pleinement justifiée.

On notera que les vins bio consommés en France sont d’origine nationale tandis que la majorité des vins bio espagnols et italiens est vendue à l’extérieur des deux pays, en Allemagne pour la plupart.

Résultats —
101 médailles sur 328 échantillons dégustés.
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À SUIVRE…