DANIEL J. BERGER

Un samedi soir d’automne 2008 à La Cave des Gobelins au 56 de l’avenue, dégustation de quelques Paul Jaboulet Aîné. Il suffit de voir sur leur site la photographie de la colline plissée et ventrue autour de TAIN L’Hermitage où poussent les vignes pour deviner le pedigree œnologique des vins.

D’abord deux blancs :
– un Saint Péray Les Sauvagères 2007, roussanne et marsanne (11 €);
– un Crozes Hermitage Domaine Mule Blanche 2006, roussanne et marsanne aussi, jeune, assez minéral, nez de fleurs d’acacia, déjà rond, finale fraîche et (trop) boisée (21,60 €). L’attendre jusqu’à 2010.


Puis quatre rouges :
– deux Crozes Hermitage – Les Jalets 2006 (13,20 €) et Domaine de Thalabert 1998 (26,10 €), le 2ème ne cachant pas l’avantage de son aînesse, puissance et finesse, bel ensemble aromatique pour les deux, avec du cuir et du suint;
– deux Hermitage La Chapelle – 1997, parfait, le nez dévoilant la Syrah en finesse. Ample, fruits noirs, doux. C’est complexe, retenu, comme salé, long, mais… 120 €; et 1988, parfait à nouveau : « soyeux » comme ils disent, à la fois allongé et large, une belle finale profonde, mais… 250 €.

— C’est beau hein ? Je peux vous avoir du La Chapelle 1961 si vous voulez…
— Ah oui, et à combien ?
— 1 500 € !
— La caisse ?
— La bouteille… C’est un vrai prodige vous savez. S’il ne fallait garder qu’une année du XXème siècle ce serait 1961. Une caisse s’est vendue dernièrement à 15 000 € chez Christie’s. Depuis, le prix continue de grimper.

Le directeur commercial de Jaboulet nous raconte l’histoire de ce docteur de Tain l’Hermitage auquel une patiente âgée avait fait don d’une caisse en paiement d’honoraires et qu’il n’avait pas acceptée, malgré l’insistance de la vieille dame, c’était du 1961, il devait se douter… Un premier expert avait fixé le prix à 100 €, mais il avait demandé une seconde expertise et… le vrai prix était annoncé : 1 500 € ! De quoi avait donc peur ce docteur, d’être accusé de recel ? Aimait-il l’Hermitage, aimait-il tout simplement le vin ?

*PS : Après avoir bu ces merveilles, revoir Un soir, un train d’André Delvaux (1968)