Newsletter BETTANE+DESSEAUVE 21.5.19
Un grand personnage de Bordeaux vient de quitter notre monde : André Lurton, propriétaire des châteaux bordelais Couhins-Lurton, La Louvière, Bonnet, Cruzeau, Rochemorin, Barbe-Blanche, Coucheroy, Guibon, Quantin, nous a quittés à l’âge de 94 ans.
Cet empereur des vignes qui totalisait dans son portefeuille de crus 630 hectares, dont plus du tiers dans la seule appellation Pessac-Léognan était depuis les années 50 celui qui avait fait de son nom de famille, Lurton, une incontournable signature du vin de Bordeaux.
C’était son grand-père, Léonce Recapet qui, en s’installant au Château Bonnet, au cœur de l’Entre-deux-mers, lui avait transmis cette passion dévorante pour la vigne. Il n’a pas été le seul de cette dynastie à devenir vigneron : son frère Lucien a transmis à ses dix enfants un patrimoine non moins conséquent de crus prestigieux. Avec son autre frère Dominique, père de Pierre Lurton, aujourd’hui président de Château Yquem et de Château Cheval Blanc, il a mené longtemps une propriété en commun, Clos-Fourtet, où Pierre a fait ses premières armes. André Lurton a eu sept enfants dont quatre sont devenus vignerons.
Dès les années cinquante, lorsqu’il reprend la propriété familiale de Château Bonnet, André Lurton s’engage tout entier dans les combats d’un monde viticole d’abord à reconstruire, puis à moderniser, enfin à raffiner. Formé par le syndicalisme agricole et l’engagement citoyen — il accumule les fonctions à la Chambre d’Agriculture, dans de nombreux syndicats viticoles dont ceux de l’Entre-deux-Mers et de Pessac-Léognan, et celle de maire de sa commune natale de Grézillac –, il n’avait pourtant rien du notable bourgeois. L’homme était né combattant et il allait construire l’ensemble de sa longue vie comme un combattant. D’abord pour créer cette immense entreprise, à partir de presque rien, Château Bonnet, dont il avait hérité en 1953 et presque entièrement détruit par le gel trois ans plus tard.
La Louvière (avant et après restauration par ses soins)
et Couhins-Lurton, deux splendides crus, ont couronné l’œuvre de ce bâtisseur. Ensuite en ne cessant, avec une volonté de fer, de tracer la route des appellations d’origine contrôlée, lui qui savait bien la fragilité du travail des vignerons. Après l’Entre-deux-mers, qu’il contribua à permettre d’affronter les bouleversements du marché des vins de Bordeaux dans le dernier tiers du XXème siècle, sa bataille homérique a été la reconnaissance de l’appellation Pessac-Léognan, séparée définitivement des graves en 1987. Il présidera le syndicat de l’appellation jusqu’en 2005.
Si quatre de ses sept enfants sont devenus vignerons, un seul, Christine Bazin de Caix, travaille aujourd’hui dans l’entreprise familiale. Jacques, raffiné winemaker, et François, bouillant vigneron-entrepreneur, ont mené à leur tour une aventure viticole respective.
À ses enfants et à toute sa famille, aux équipes des vignobles André Lurton, nous nous joignons à l’équipe de Bettane+Desseauve tout entière pour présenter nos sincères condoléances.