Sources : e-lettre Vitisphere, FIJEV, Meininger’s Wine Business International, OIV, Thomson Reuters, UPI, Viniflhor, 1855.com…

Vins français : simplification des appellations

Paris, juin 08 — À partir d’août 2009 nous pourrons lire sur les étiquettes les nouvelles mentions Appellation d’Origine Protégée (AOP), Indication d’Origine Protégée (IGP), et Vin sans Indication Géographique, correspondant aux trois niveaux d’appellation retenus dans par le « plan quinquennal de modernisation de la filère viticole » du ministère de l’agriculture français.

L’AOP se réfère à un terroir marquant caractéritique d’une typicité indiscutable. L’IGT est attribuée aux vins régionaux et remplaceront les VDQS (Vin De Qualité Supérieure). Quant aux Vin sans Indication Géographique, ils se substitueront aux Vin de table, sans limite de rendements et pouront mentionner le ou les cépages sur les étiquettes, tendance inititée par les vins du nouveau monde.

Le plan du ministère vise à clarifier la lisibilité des provenances et à améliorer la compréhension des règles de vinification. Recommandée par de nombreux experts, cette simplification entend aussi mieux favoriser la pénétration de la production française sur le marché mondial et notamment les marchés émergents comme l’Inde et la Chine, où  la consommation augmente d’environ 6% par an, alors que dans l’hexagone on boit moitié moins de vin qu’il y a 40 ans et que la surface de production passe selon les variations statistiques annuelles, derrière celle de l’Espagne ou de l’Italie.

Le monde pourrait-il manquer de vin ?

Bien malin celui qui comprend ce qui se passe dans les vignes autour de la planète. L’OIV vient de publier les chiffres mondiaux 2007. Ça monte, ça descend, on plante dans le nouveau monde, on arrache en Europe, on boit plus ici, moins là, les rendements varient du simple au quadruple. Allez donc savoir…

En Europe, on arrache : 31 000 ha en Espagne, 22 000 en France, 9 000 en Italie. Objectif de la Commission européenne : – 400 000 ha à l’horizon 2012, revus depuis à – 200 000. Pendant que dans le nouveau monde, on plante : 11 000 ha aux USA, 17 000 en Argentine et 8 000 au Chili. La superficie de vignes dans le monde est toujours d’environ 8 millions d’hectares.

Et la France ? « En Languedoc Roussillon, » remarque un courtier de vins en vrac, qui y est implanté, « on a tout pour être les 1ers du monde sur le marché des vins en vrac, le climat et la technologie permettent de faire des vins de cépage qui n’ont rien à envier aux vins chiliens, sud-africains… Mais au Chili, on produit des Cabernet à 180-200 hl/ha. Ici, la production est limitée à 90 hl/ha, voire 80 hl en vin de pays d’0c, alors qu’on pourrait faire de l’aussi bon avec des rendements plus élevés. Alors à 60 €/hl, la production n’est pas rentable et les viticulteurs arrachent. Un vrai gâchis. »

La production mondiale est passée de 286 à 266 millions hl. En Europe, on produit moins mais mieux, grâce à la baisse des rendements. Mais, on se plaint un peu partout, comme en Languedoc Roussillon encore, où ça râle sévère : « on ferait mieux de laisser les raisins sur souche pour repartir quand la demande repartira comme l’ont fait les Américains. Notre région pourrait être le poumon français des vins en vrac, mais l’arrachage risque de nous faire perdre notre taille critique et la demande va partir ailleurs. L’arrachage massif est une hérésie dans notre région » se désespère le courtier.

La consommation mondiale se maintient depuis trois ans à environ 240 millions hl. Mais l’OIV reste préoccupée : « on a besoin de nouveaux marchés, de nouveaux pays consommateurs « . D’autres s’alarment dans l’autre sens : « On s’attend à une hausse en Inde, en Chine et en Russie où une population aisée croissante se met au vin ». Antony Perrin, le propriétaire de Château Carbonnieux (Pessac-Léognan) : « On peut imaginer d’ici 5 à 10 ans une demande supérieure à l’offre en CC entre 20 et 50 €, et un nouveau marché pour les bordeaux entre 7 et 12 €. »

Hong-Kong carrefour du vin en Asie-Pacifique

Hong-Kong, mai 08 Trois mois après la suppression des taxes sur le vin et la bière en février, les achats sur le marché asiatique dont Hong-Kong est la plaque tournante (« The Asia Wine Hub ») ont vite augmenté.

Désormais carrefour du commerce et de la distribution des vins en Asie-Pacifique, H-K devient aussi la 1ère place de marché. Les collectionneurs de H-K qui détiennent à eux seuls environ 1 million de caisses (12 b) de grands vins (plus de 100 $/b), soit 1/4 des grands vins provenant du monde entier mais surtout de France, font revenir leurs trésors jusque là stockés à l’étranger : la dernière vente aux enchères de Bondhams a atteint 1,5 million $ – dont 2 Petrus 1990 et 2000 à 57 240 $ chaque, et 6 magnums de 1982 Lafite Rothschild 1982 à 36 151 $ l’unité. À son tour le négociant américain Acker Merrall & Condit en organise une en mai dont le montant estimé à 5 M$, est le double de ce qui s’est vu à H-K.

Mais qui a trafiqué mon Brunello ?

Sienne, Toscane, mai 08600 000 b de Brunello di Montalcino 2003 de la société Castello Banfi, et des stocks de sociétés connues – Biondi Santi, Frescobaldi, Antinori ou Argiano – ont été mis sous séquestre par décision de la cour de Sienne début avril, en attendant les conclusions de l’enquête de police.

Motif : soupçon de fraude au vu du volume de production, supérieur aux possibilités de l’appellation. Le Brunello couvre 2000 ha sur les coteaux au sud de Sienne. Le cépage Sangiovese qui le compose exclusivement aurait été coupé de Sauvignon, de Merlot et de vin des Pouilles au sud de l’Italie. Levée de bouclier des producteurs qui assurent que 1 700 ha sur les 2 000 de l’appellation viennent d’être contrôlés sans irrégularité; que la fraude, qui ne concernerait que 1% de la production, risque de jeter le discrédit sur la totalité du Brunello; que c’est une simple embrouille administrative… Frescobaldi, qui explique mélanger légalement Merlot et Sangiovese dans certains vins, menace d’attaquer la presse en diffamation. Les USA menacent de bloquer les importations. À partir du 9 juin, tous les Brunello devront être accompagnés d’un certificat attestant qu’ils sont 100% Sangiovese. La menace est prise très au sérieux car le marché américain absorbe 25% de la production.

Raisin-riz, même combat… chinois

Napa Valley, Californie, avril 08 — La société chinoise China Organic Agriculture qui commercialise du riz bio en Chine, vient d’acheter Bellisimo Vineyard, une société américaine qui vend du raisin aux viticulteurs californiens comme Gallo, Dry Creek ou Clos du Bois, avec l’idée d’importer elle-même des vins de Californie en Chine.

On a en effet constaté une forte augmentation du marché chinois du vin, d’environ 40% en 2007. Il y a maintenant dans le pays 500 exploitations viticoles sur environ 180 000 ha, pour une consommation estimée à 1.12 l/habitant/an, consommation encouragée par une grande distribution qui s’étend dans les villes rurales. La progression se fait de manière un peu identique à ce qui se passe aux USA, par le canal de nouveaux cavistes et wine clubs, et des ventes par internet. Quatre producteurs contrôlent 50% du marché et rendent difficile la pénétration du pays aux importateurs. La perception des vins autres que chinois par le grand public est encore très faible.

Champagne un jour, champagne toujours ?

Champagne, Canton de Vaud, Suisse, avril 08 Les viticulteurs du village de « Champagne » dans le canton de Vaud ne sont plus d’accord.En 1999 la Suisse avait signé un accord avec l’UE aux termes duquel le nom « Champagne », exclusivement réservé à la région française d’appellation, ne serait plus utilisé après 2004.

Après un référendum local, ils militent pour reprendre leur nom, car depuis qu’ils l’ont fait disparaître de leur étiquette, leur vin se vend nettement moins bien : 100 000 b avant, 32 000 depuis. « C’est le nom de notre village depuis 885 et on fait du vin ici à Champagne depuis 1657 » proteste Thomas Bindschedler, le leader des contestataires. L’affaire va être discutée à l’OMC à… Genève.

Le vin américain veut profiter du $ faible

Colorado USA, avril 08Sur le marché américain du vin, qui a atteint les 30 milliards $ en 2007, désormais 1er marché mondial en valeur, les importations commencent à baisser (- 5% en janvier) et la récession pourrait profiter aux exportations de vins de Californie (déjà + 11% en janvier).

Sur le marché domestique, les plus de 45 ans préfèrent le vin américain et les moins de 30 ans les vins importés. La profession, à commencer par les Californiens, réfléchit à un marketing plus ciblé. Une autre région voudrait bien rejoindre la cour des grands, c’est le Colorado — 60 petites exploitations qui ne produisent que 120 000 b/an : « We’ve been growing grapes out here for 100 years or more, » remarque le directeur du Colorado Wine Industry Development Board, qui ajoute : « Si la vigne doit souffrir pour produire du bon vin, alors ici c’est vraiment l’endroit. »

Bingo pour Redondo

Redondo, Portugal, avril 08La coopérative Adega de Redondo cartonne, à la fois sur le marché domestique, avec ses marques Porta da Ravessa (9 Millions b) et Real Lavrador (4 Mb), toutes deux au top 10; et à l’export, passant de 200 000 b en 2004 à 1,5 M en 2007, vendues en Europe (la France est 2ème acheteur), ainsi qu’au Brésil, aux USA, en Afrique du Sud et au Mozambique.
NB. Le guide Top 10 Vinhos Portugal aux éditions DK – 10 vins pour tous les jours, 10 bio, 10 grands rouges, 10 grands blancs, etc., chaque terroir vu au plan de l’œnologie et de l’œnotourisme avec cartes et photos – est l’œuvre d’un dégustateur hors pair, Anibal Coutinho, par ailleurs choriste à la Fondation Gulbekian à Lisbonne.

Berthomeau : les vins français ne sont pas dans le coup

Paris, mars 08Contrairement à ce que l’on croit souvent, ce n’est pas le Nouveau Monde qui menace le plus le vin français, mais bien l’Union européenne, en particulier l’Espagne. En 5 ans, la productivité y a augmenté de 31%, et en Italie de 4,5%, tandis qu’en France elle a perdu 5%. Le prix moyen d’une b à 2,26 € (hors Champagne) y est 46% plus élevé que dans les 15 pays principaux producteurs de l’UE.

Le marché français, puissant mais trop atomisé, est « suradministré » selon Jacques Berthomeau, ancien haut fonctionnaire du ministère de l’agriculture et auteur en 2001 d’un rapport remarqué. À son avis, l’administration veut protéger le vin français et au lieu de responsabiliser la profession, en réalité la corsète. On dépense trop d’énergie à vouloir toucher le marché de détail français à des prix compétitifs « et ce n’est pas là que ça se passe » ajoute Berthomeau, qui indique que les producteurs français devraient avoir la possibilité de fixer eux-mêmes leurs prix, et que la règlementation AOC ne devrait pas s’appliquer aux vins non AOC, laissant ainsi la liberté de produire en fonction des attentes du public.

« Les Français ont très bien su vendre la notion de terroir » remarque de son côté Daniel Murphy, courtier international en vins en vrac basé en Languedoc Roussillon, « en vins haut de gamme, il y a très peu d’acteurs sur le marché mondial et les vins français restent la référence. Les Australiens essaient d’élaborer des cuvées haut de gamme : ils ont baissé leurs rendements et obtenu des vins très concentrés mais sans la finesse ni la complexité des French Wines. Maintenant les Français doivent aussi comprendre que l’amour du produit ne suffit pas : l’industrie du vin c’est du business. Regardez le Champagne : ce n’est pas le terroir qui fait son succès, ce sont les marques ». Murphy regrette que les autres régions, le Bordelais notamment, à part les grands crus, n’aient pas encore créé de marques leader capables de mieux tirer le vin français sur le marché mondial.

Sources : AFP, e-lettre Vitisphere, FIJEV, Meininger’s Wine Business International, OIV, Thomson Reuters, UPI, Viniflhor, 1855.com…