DANIEL J. BERGER

Dans la video d’origine portugaise enregistrée au restaurant Laurent à Paris (lien ci-dessous), on voit quinze des plus grands dégustateurs d’Europe s’essayant à l’aveugle sur des 1ers Grands Crus Classés de Bordeaux du millésime 2001. A l’issue de l’exercice, un « sans-grade » du bordelais se retrouve classé 2ème devant les seigneurs de Margaux, d’Ausone, de Haut-Brion, de Lafite, etc. Regardez !

Il peut arriver dans les concours de dégustation, comme celui de Bruxelles par exemple, que soit introduit dans une série deux fois le même vin ou un intrus. Et cette video illustre bien la difficulté pendant une dégustation à l’aveugle, exigeant une grande concentration pour différencier les caractéristiques de crus d’une même série, d’avoir le recul et l’acuité nécessaires pour démasquer un « alien ». Et elle pose clairement la question de la relativité des catégories et des classements.

Le commentateur, François Mauss, président du Grand Jury Européen et organisateur du World Wine Symposium connu comme « Davos du vin », prétend qu’un tel constat ne peut être fait par les revues de vin, « financées par la publicité » et sans grande propension à comparer les vins de classes ou catégories distinctes, par exemple en bordelais, Grands Crus et Crus Bourgeois, ou Crus Artisans et Bordeaux Supérieurs. C’est vrai et faux à la fois : la Revue des Vins de France notamment avait en son temps organisé une dégustation à l’aveugle pour de grands chefs en leur posant la question : « à quel prix mettriez-vous ces vins à votre carte ?« , où (de mémoire) le Haut-Brion dégusté était évalué à 10 € et un simple Languedoc à 50. Et il arrive que d’autres osent des comparaisons iconoclastes ou « objectives », mais assez rarement, c’est entendu.

Rappelons-nous aussi le fameux Jugement de Paris de 1976, prononcé à nouveau trente ans plus tard avec pratiquement les mêmes vins et des différences de classement final accrues entre GCC de Bordeaux et vins californiens, à l’avantage indiscutable de ces derniers en 2006 (j’ai l’intention d’interroger le Sage Michel Dovaz qui a participé aux deux événements et déclaré les résultats « incompréhensibles »).

Blog du GJE
Article NYT sur le Jugement de Paris