Tu l’as gardée ta Cartier toi ?

Bernard MAGREZ, propriétaire de 21 vignobles dans le bordelais dont PAPE CLÉMENT, de 14 en Languedoc, en Amérique du sud, Californie, etc. et associé à Gérard Depardieu, a invité récemment à déjeuner une quarantaine de journalistes de la presse du vin, à l’issue duquel il leur a offert une MONTRE CARTIER.
Michel BETTANE, président de l’Association de la Presse du Vin française, lui a posté le 30 avril 2008 la lettre ouverte ci-dessous.

Cher Bernard Magrez,

en tant que président de l’A. P. V. je me dois de vous faire part des interrogations de nombreux membres de notre association lorsqu’ils ont pris connaissance du cadeau que vous avez offert aux journalistes ayant accepté une récente invitation-déjeuner-dégustation de vos vins, en l’occurrence une montre Cartier de collection, d’une valeur supérieure à 1 500 €.

L’information, largement diffusée dans de nombreux pays étrangers, a beaucoup contribué à jeter le doute sur la profession de journaliste français du vin et a permis à tous ceux qui ont fixé des règles strictes et parfois même infantiles en matière de cadeau d’entreprise de se gargariser de leur indépendance auto-proclamée.

Les journalistes présents à ce déjeuner ont déjà réagi en renvoyant cette montre, en faisant à des associations caritatives des dons comparables à la valeur de celle-ci et vous ont écrit leur réprobation. Je suis convaincu que tout ceci n’était qu’une maladresse de communication et qu’il n’était nullement dans votre intention et encore moins dans votre intérêt et dans vos moyens de corrompre vos invités !

Il serait sans doute bon pour clarifier les rapports à venir entre la presse internationale et vos produits d’envoyer à notre association une lettre clarifiant votre geste et votre pensée sur ce sujet.

Dans cette attente, cher Bernard Magrez, veuillez recevoir l’expression de mes meilleurs sentiments.

Michel Bettane

APV, Vignobles Magrez

COMMENTAIRES.
Suite à cette lettre ouverte, plusieurs commentaires de journalistes (extraits) :
– Le déjeuner Magrez est une farce « bling bling » qui déshonore et ridiculise notre profession, met à mal notre crédibilité et a déjà largement fait le tour du monde du Net, sans désapprobation d’un seul syndicat ou association de journalistes.
– C’est à nos syndicats professionnels et associations de dénoncer ce type de corruption avec fermeté.
– La lettre est tardive (le déjeuner a eu lieu le 26 mars) et trop molle : elle demande à Bernard Magrez de justifier ses « pots de vin ». On continue à lui trouver des excuses.
– Quand on voit ce qui se pratique dans l’automobile, la beauté et la mode ou le voyage, n’est-il pas normal qu’un service de com assimile les comportements de diva de certains de nous à ceux d’Anna Wintour (rédac chef de Vogue) ?
Attention aux pratiques de notre profession : certains ne se déplacent que si le lieu est luxueux, en 1ère classe, emmènent quelqu’un et réclament des bouteilles.
– Sur les 40 journalistes présents au déjeuner, combien ont vraiment rendu la montre ?
C’est aux journalistes de refuser tout cadeau (> 100 €).
Je ne citerai plus jamais le nom de Bernard Magrez dans un article. Que d’autres agissent comme moi, seule manière de faire comprendre que nous ne sommes pas achetables et que nous avons un minimum de déontologie.
Une montre à gousset aurait été plus significative, pour la symbolique de la chaîne.
S’il s’était agi d’une Rolex, l’insulte aurait été moins grande, c’est quand même la montre présidentielle… Une Cartier d’occasion ne vaut plus grand chose.
– Je n’ai jamais reçu même une Swatch, mais dans le cadre de mon travail journalistique, j’accepte invitations à déjeuner et bouteilles.
Magrez n’est coupable de rien, il a traité notre profession avec le respect qu’elle est en droit d’inspirer à quelqu’un qui vend beaucoup partout dans le monde des vins qui n’existent que par son intelligence.